C'est un "sujet indissociable de toutes les problématiques de soins", estime Ingrid Labuzain, journaliste et animatrice d'une table ronde sur la prévention, lors du forum d'échange "Impacts santé" organisé par La Tribune, avec le soutien de Concours pluripro, le 25 avril dernier. En France, en 2019, "la part de la dépense en prévention, dans la dépense de soins totale, était de 2 %, expliquait en introduction Pierre-Yves Geoffard, économiste et directeur d'études à l'Ecole des hautes études en sciences sociales. C’est-à-dire que 98 % de la dépense concerne les soins curatifs et 2 % la prévention, a-t-il insisté. Au niveau de l'OCDE, c'est 2,7 %. On n'en est pas très loin, mais on est quand même en dessous. Au même moment, la Grande-Bretagne est à plus de 5 %." Des chiffres aussitôt nuancés par l'économiste : "En 2021, c'est différent, ajoute-t-il. On était à plus de 5 % en France comme dans l'OCDE et on était à 12,5 % en Grande-Bretagne. Il y a eu énormément de dépense de prévention notamment dans les vaccins et les tests", justifie-t-il. Pierre-Yves Geoffard en tire déjà une conclusion optimiste : le manque de moyens pour la prévention "n'est pas une fatalité".  

 

Inégalités sociales

Mais pour améliorer la prévention en elle-même, lui et Clarisse Lhoste, autre invitée de cette table ronde et présidente du laboratoire pharmaceutique MSD, s'accordent sur un point : il faut multiplier les portes d'entrée et faire de l'"aller vers". Parce que plus encore que pour l'accès aux soins, les inégalités d'accès à la prévention sont particulièrement fortes. Par exemple, cite Pierre-Yves Geoffard, avant que le vaccin contre le Covid n'arrive, une enquête menée auprès des professionnels d'un hôpital révélait que le taux d'"acceptation spontané du vaccin était de 98 % pour les médecins, 70 % pour les infirmières et infirmiers, et 46 % pour les aides-soignantes et aides-soignants. Attention, rassure-t-il, cela ne veut pas dire qu'il y a 60 % d'"antivax". On parle d'acceptation et pas de refus. Il y a toute une zone grise." Mais cette inégalité n'est pas propre à la pandémie affirme l'économiste, "elle est vraie sur tous"

Pour combattre ses inégalités, "il faut des actions ciblées" avance Clarisse Lhoste, rejointe par Pierre-Yves Geoffard : "On ne peut pas imaginer qu'une même campagne de prévention permette de toucher l'ensemble de la population. Parce qu'elle est très différente d'un territoire à l'autre, socialement, économiquement, et culturellement. Il faut accepter d'avoir des discours et des actions différentes." Pour Pierre-Yves Geoffard, il ne faut pas penser du haut vers le bas, mais bien du bas vers le haut. "Il y a énormément de gens sur le terrain qui veulent faire des choses et qui veulent les faire bien. Mais tant que l'on continue de réfléchir à savoir quel est l'acteur entre Bercy, Ségur, ou la Cnam, on passe à côté du problème", estime l'économiste, qui préconise un changement d'organisation du système de santé.  


 

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