Médecin déconventionné et maison de santé, est-ce compatible ? Le code de la santé publique comme l’accord conventionnel interprofessionnel (ACI) demeurent relativement muets sur le sujet. Plus précisément, l’ACI, qui vient fixer la rémunération forfaitaire de la maison de santé en fonction du niveau d’atteinte d’indicateurs, ne vise, sur l’accès aux soins, comme indicateurs que l’amplitude horaires et la prise en charge de soins non programmés.

Seul l’article 13.2 de l’accord précise être "applicable aux professionnels libéraux conventionnés avec l’Assurance maladie associés dans le cadre d’une société dont le statut juridique permet de percevoir des rémunérations de l’assurance maladie au nom de la structure elle-même, dans le respect de la réglementation fiscale et comptable, telle que la société interprofessionnelle de soins ambulatoires (Sisa), constituée ou en cours de constitution ayant conclu avec l’Assurance maladie et une agence régionale de santé un contrat conforme au contrat-type joint en annexe 1 du présent accord sous réserve qu’il soit signé par des organisations syndicales le rendant applicables pour au moins deux professions différentes représentées dans les Sisa dans les conditions définies à l’article L. 162-14-1-2 du code de la santé publique."
 

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Néanmoins, deux lectures opposées peuvent être faites de cet article. Tout dépend, si le conventionnement auquel il est fait référence dans l’article renvoie au conventionnement des professionnels de santé libéraux à titre individuel ou s’il renvoie au conventionnement des professionnels au travers de la MSP.

En d’autres termes, il peut y être lu :
- d’une part, le fait que l’accord est applicable aux seuls professionnels libéraux conventionnés avec l’assurance maladie et associés d’une Sisa. Cette interprétation impliquerait que seuls les médecins conventionnés pourraient bénéficier de l’accord conventionnel interprofessionnel, et donc in fine des dotations ACI, et que seule la patientèle des médecins conventionnés devrait être prise en compte dans les modalités de calcul de l’ACI.
- d’autre part, que l’accord est applicable aux professionnels libéraux conventionnés avec l’Assurance maladie via la Sisa. Dans ce dernier cas, à l’inverse, les médecins déconventionnés n’apparaissent pas exclus du dispositif.

 

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Après avoir interrogé l’Assurance maladie, il semblerait que la seconde lecture soit à privilégier. En d’autres termes, l’ACI n’interdirait pas l’exercice des médecins en secteur 3 en maison de santé et leur patientèle serait comptabilisée. Cette approche doit néanmoins être officialisée par l’Assurance maladie.

 

Et l'accessibilité financière ?

Au-delà de la lettre du texte, il convient de revenir sur l’esprit du texte. En effet, il convient de rappeler qu’un des objectifs principaux portés par les maisons de santé demeure d’améliorer l’accès aux soins, ce qui inclue nécessairement une accessibilité financière. À défaut, cela pourrait revenir à exclure les personnes en situation de précarité, ce qui serait totalement aux antipodes du but poursuivi par ces projets.

C’est pourquoi si l’ACI dans ses composantes socles sur l’accès aux soins ne vise comme indicateurs que l’amplitude horaires et la prise en charge de soins non programmés, ces objectifs sont pour autant indissociables de la nécessaire accessibilité financière aux soins.

Cette condition se retrouve généralement dans le cahier des charges des maisons de santé établi par les ARS de manière plus ou moins stricte. À titre d’exemple, dans le cahier des charges de l’ARS Ile-de-France en 2023, il est souligné qu’"une garantie d’accessibilité financière aux soins doit être assurée par la structure aux patients et, dans ce cadre, une offre à tarif opposable significative doit obligatoirement être proposée au sein de la MSP, y compris pour les demandes de soins non programmés". Dans d’autres régions, le cahier des charges impose en maison de santé une offre de soins exclusivement à tarif opposable. Des différences s’observent donc au niveau régional.
 

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Les projets de santé portés par les maisons de santé doivent ensuite décliner les mesures prises pour faciliter l’accès de tous aux soins et, notamment et plus particulièrement, des personnes en situation de précarité en regard du cahier des charges.

Par conséquent, à notre sens, si un doute peut subsister sur le sujet quant à l’interprétation littérale du texte, il n’en demeure pas moins que dans l’esprit du texte, le déconventionnement apparaît difficilement compatible avec les missions portées par une MSP. Il est d’ailleurs exclu dans certaines régions par le cahier des charges établi par l’ARS et peut être encadré par les professionnels eux-mêmes dans leur projet de santé. Une clarification apparaît nécessaire !


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