Un règlement de comptes. Le 25 septembre dernier, lors du conseil municipal, la question de l’avenir du centre de santé mutualiste François-Billoux de Gardanne dans les Bouches-du-Rhône, ouvert en 1981 et qui a fait faillite dans une "relative indifférence en 2024", s'est transformée en "clash" entre élus de la majorité et de l'opposition. Principale délibération à l'ordre du jour, la "résiliation du bail emphytéotique" [d'une durée de 18 à 99 ans, NDLR] signé en 1988 avec l’union des mutuelles des travailleurs, explique le journal La Marseillaise. Samia Gamèche, élue du deuxième groupe d’opposition de gauche, sollicitait également une demande d'engagement de la municipalité, à laquelle elle proposait de saisir l'ARS et le Département afin de "demander la réouverture d'un centre mutualiste" et l'engagement de concertations.  

"Les hôpitaux publics, les centres de santé, les services de proximité paient le prix fort des économies budgétaires. L’État abandonne, et les territoires en subissent les conséquences. En 2024, en conseil municipal, M. Garcia [adjoint aux sports et à la santé, NDLR] a déclaré : 'Notre souhait est que ce centre reste un centre de santé. [...], a lancé Samia Gamèche. Où en est-on ? Le centre est fermé, les patients sont livrés à eux-mêmes, on voit fleurir des structures privées. Est-ce cela votre vision de la santé pour toutes et tous ? [...] La santé ne doit pas être une marchandise. [...] Nous demandons un engagement clair, la municipalité doit saisir le Département et l’ARS." Il faut dire que la décision de la municipalité, dirigée par Hervé Granier, qui propose de le remplacer par un nouveau centre médical, géré par des médecins libéraux et la société (privée) Medigard, ne fait pas l’unanimité parmi les élus.  

"Il n'y a qu'une seule santé, celle de tous les habitants. Ce que vous appelez 'privé' représente toute la santé libérale et conventionnée", a déclaré Jean-François Garcia, médecin généraliste et adjoint aux sports et à la santé d’Hervé Granier. Avant de rappeler que le centre de santé été géré jusqu'en 2018 par le Grand conseil de la mutualité puis repris en 2019 par le groupe mutualiste Oxance. "Entre 2014 et 2018, pendant cinq ans, vous avez accompagné M. Jorda et La Piana [deux élus de l’opposition, NDLR], le Grand conseil de la mutualité qui gérait le centre, dans son marasme financier et dans sa carence d'offre de soins", a-t-il poursuivi.  

Soulignant la non-réalisation des travaux du bâtiment d'un montant de 900.000 euros, toujours selon Jean-François Garcia, il a aussi évoqué l'apparition d'un autre centre mutualiste Filieris. "Nous n'avons pas de visibilité sur ce bâtiment (…) Le bâtiment est destiné à la santé et le restera (…) il faut l'imprimer", a déclaré le médecin face aux élus de l'opposition. "Vous dites qu'il y a des projets, mais lesquels ? (…) La question est 'Quelles propositions à une population qui va être de plus en plus en difficulté pour accéder aux soins'", a rétorqué Jean-Marc La Piana, médecin généraliste également, directeur du centre de soins palliatifs "La Maison" et leader du second groupe d'opposition. Dès lors, les deux médecins se sont âprement affrontés sur le sujet avant de dériver sur des attaques nettement plus personnelles, comme le rapportent nos confrères de La Provence.  

 

Une passe d'armes rocambolesque

Jean-Marc La Piana, futur probable candidat aux élections municipales en 2026, est revenu sur le besoin d’une "réflexion collective" sur l’avenir de la santé à Gardanne, et a dénoncé la réunion organisée par la majorité sur le sujet mais pas "assez étayée" selon lui. Une remarque qui n'a pas été du goût de son confrère et opposant politique. "Vous êtes un peu à côté de la santé. Je suis désolée de vous le dire, vous avez été radié de la CPTS depuis 4 ans, vous ne vous en êtes même pas rendu compte. Vous n’êtes pas dans nos échanges", a taclé Jean-François Garcia. Du tac au tac, Jean-Marc La Piana a demandé la raison de sa radiation, ce à quoi Jean-François Garcia lui a retorqué qu'il ne "pay[ait] pas [ses] cotisations". "La CPTS c'est 800 professionnels de santé, dont près du quart à Gardanne. Vous n'en faites pas partie. Comment voulez-vous être intégré dans les projets ?", a-t-il poursuivi.   

Loin d'en avoir terminé et visiblement piqué au vif, Jean-Marc La Piana a répliqué à son tour : "Si vous aviez l'envie que je participe à quelque chose, vous me l'auriez fait savoir, a-t-il répondu, toujours selon La Provence. C'est malhonnête de votre part, vous savez que j'ai toujours été ouvert à participer aux questions de santé quels que soient les partis politiques sauf un. Personne ici ne peut dire que j'ai fermé la porte [...] vos propos sont extrêmement décevants. C'est très bas."  

Après un dernier échange houleux entre Jean-Marc La Piana et le maire, Jean-François Garcia a déclaré qu'il n'avait "pas le pouvoir de radier qui que ce soit" et qu'il avait "toujours souligné [le] travail" de son confrère. "Maintenant c'est 'moi je, moi je'... Nous sommes 800 professionnels de santé. Chacun de nous fait un boulot formidable." "Moi aussi", lui a rétorqué le principal intéressé. "Moi je, moi je...", l'a repris Jean-François Garcia. "Votre travail en tant que médecin est formidable, votre travail en tant qu'élu, c'est autre chose." "J'en dis autant de vous", a lâché Jean-Marc La Piana avant que le maire ne close le débat et ne passe au sujet suivant. L'avenir du centre de santé est donc resté sans réponse concrète.  

[Avec La Provence et La Marseillaise

 

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