Pour un professionnel, envisager en 2018 son exercice au sein d’un regroupement pluripro suppose peu ou prou d’être familiarisé avec les "grandes" caractéristiques de cet exercice pluriprofessionnel. Cette familiarité n’est pas toujours évidente… avant tout parce que l’évolution est somme toute récente et parce que les études médicales en général et l’internat en particulier n’y préparent encore qu’irrégulièrement et inconstamment. Pour les soins primaires – eux aussi précisés il n’y a pas si longtemps et encore souvent l’objet d’incompréhension – ces regroupements pluriprofessionnels ont pris la forme iconique des maisons de santé. Une suspicion d’exclusivité a aussitôt pesé sur ces maisons ; fort heureusement, l’électronique de plus en plus agile a favorisé les regroupements "hors les murs" ou virtuels, ouvrant ainsi à la diversité.

Il reste que les grandes caractéristiques qui fondent l’exercice pluripro restent méconnues. Les professionnels réunis à la HAS avaient produit en 2014 une matrice de maturité qui identifiait sous le terme d’"axes" les quatre caractéristiques principales. Avant tout, l’exercice en équipe et ses potentialités (de plus en plus perçues comme des avantages et non comme des contraintes) ; ensuite, le corollaire indispensable du système d’information souvent sous-utilisé par l’usage qu’en font les équipes… puis l’implication des malades, de leur entourage et au-delà des groupes de population, construisant ainsi une éducation/prévention de troisième génération. Enfin, le "projet de santé territorialisé" (vocable qui, en 3 mots, introduit deux révolutions : le territoire et le projet sanitaire et social) et qui reste peut-être le chaînon faible de l’évolution en marche.

En effet, peu de choses dans notre culture professionnelle conduisaient jusqu’ici les médecins (sauf ceux longtemps marginaux qui s’engageaient dans la santé publique) à accorder une importance équivalente aux groupes et à l’individualité. C’est chose faite désormais. Et les jeunes ou moins jeunes qui se regroupent trouvent naturel et utile de s’enquérir de santé scolaire, de l’organisation des divers services sociaux ou plus généralement de données épidémiologiques de la population locale. Il est vrai que cela n’est ni nouveau ni spécifique à notre pays. Déjà, voilà bien des années, un grand ancien appelait à de profondes réformes des finalités et des structures : on peut relire à cet effet "le discours de Robert Debré".* Plus près de nous, on peut aussi relire avec profit le "Docteur cinq étoiles"** promu par l’OMS depuis le début des années 1990 et qui préfigurait l’équipe pluriprofessionnelle.

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