"J’ai toujours aimé faire part de mes idées, de mes convictions, tout en restant à l’écoute des autres, soutient la pharmacienne. Tout ce que je fais dans la vie, c’est dans le partage." C’était déjà le cas lorsqu’elle était étudiante, période pendant laquelle elle répartit son temps entre les bancs de la fac et les compétitions de volley au national et à l’international. "Aujourd’hui, je fais du chant dans une chorale, explique-t-elle. C’est important pour moi d’être tournée vers les autres, dans mes activités personnelles mais aussi professionnelles." 

D’ailleurs, si Brigitte Bouzige a décidé de devenir pharmacienne, "c’est parce que je voulais être au contact des gens, raconte-t-elle. Le rôle du pharmacien va au-delà de la dispensation des médicaments car nous sommes des professionnels de proximité, la porte de notre officine est ouverte du matin jusqu’au soir pour tous les patients, avec ou sans rendez-vous." Et de poursuivre : "Mon officine à Les Salles-du-Gardon (Gard) se trouve dans un bassin de vie très défavorisé, cela se ressent dans la patientèle qui a vraiment besoin d’écoute, de chaleur humaine et d’accompagnement. Certains patients viennent juste pour parler. Si nous pouvons répondre à leurs attentes, alors c’est gagné !"


L’esprit de groupe

Son engagement au sein de la profession naît en même temps que l’acquisition de son officine en 1986. "En m’installant, j’ai immédiatement adhéré au groupement Giphar. Très rapidement, je me suis investie pour cette coopérative de 1 300 officines." D’abord au niveau local, en proposant des vitrines identiques à l’ensemble des pharmaciens Giphar du territoire afin d’initier une identification commune. "C’était éthique, thématique et sans publicité, raconte-t-elle. Nous choisissions un thème différent chaque mois, comme les poux, le tabac, la toux. Cela m’a vraiment plu car j’aime tout ce qui touche à la création." 

Cette idée, reprise au niveau régional puis national, fait d’elle la chargée de développement du concept. Elle accède par la suite au poste de présidente du pôle informatique du groupement, jusqu’à devenir la vice-présidente pendant six ans, puis la présidente, en 2008, pendant trois ans. "J’ai œuvré pour la mise en place d’un logiciel unique dans toutes les pharmacies Giphar afin de rendre la communication plus facile entre nous", se rappelle-t-elle. Brigitte Bouzige soutient aussi la réflexion autour de l’évolution du métier de pharmacien avec l’implication du professionnel dans les actions de prévention, l’accompagnement du patient ou la prise en charge de sa maladie. Les prémices de son action syndicale…

Afin de ne pas "tout mélanger", la pharmacienne attend la fin de sa présidence en 2011 pour s’engager au sein de l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO). Déjà adhérente depuis plusieurs années, elle devient vice-présidente en 2012. "Intégrer l’USPO m’a permis d’entrer dans le monde politique, celui qui manquait le plus à mon expérience, reconnaît-elle. Mais je me suis aperçue très vite que je n’étais pas 'une vraie politique', j’ai besoin de garder ma liberté de parole coûte que coûte." Au sein du syndicat, elle poursuit son engagement dans la défense du rôle du pharmacien. "Nous avons fait de grandes avancées aujourd’hui avec le bilan de médication ou encore l’entretien pharmaceutique décliné sur plusieurs pathologies." 


Un "rêve" pour les professions de santé

Parallèlement à l’USPO, Brigitte Bouzige s’engage au sein de la FFMPS. "Je me souviens encore de ma première réunion à la FFMPS organisée en 2011 par Pierre de Haas [le président de l’époque, NDLR], se remémore-t-elle en riant. L’USPO m’avait demandé d’y assister. Je n’ai rien compris ! Mais je découvrais, avec les MSP, des organisations dont je ne soupçonnais pas l’existence alors qu’elles correspondaient exactement à ce dont je rêvais pour nos professions de santé." 

L’engagement était lancé. Dès 2012, elle devient vice-présidente. "Le bureau de la FFMPS et son conseil d’administration représentent la pluriprofessionnalité dans son expression la plus aboutie." Et d’ajouter : "C’est un signe très positif pour les pharmaciens, au même titre que cela le serait pour les autres professionnels de santé car le fait que nous soyons sur le terrain ensemble, que nous réalisions des projets ensemble et que nous soyons représentatifs ensemble au ministère ou à la Cnamts rend visible et concrète la pluriprofessionnalité. Souvent, les pharmaciens pensent qu’il y a un mur infranchissable entre eux et les médecins. Mon souhait est de convaincre que ce n’est pas le cas. Se connaître, se reconnaître, se parler, échanger, communiquer, c’est le plus important." 

L’action de terrain est d’ailleurs ce qui séduit le plus Brigitte Bouzige au sein de la fédération. "On ne défend pas, on agit ! C’est l’univers dans lequel je me sens le plus à l’aise car l’emprise politique y est faible et l’écoute est aidante et participative. Et c’est d’ailleurs la clé de la réussite de la FFMPS." Aujourd’hui, les projets de la fédération s’accélèrent. "Nous souhaitons mettre au même niveau l’ensemble des fédérations régionales afin qu’elles aient toutes les moyens nécessaires à un accompagnement des équipes de soins sur le terrain et que ce soit le plus optimal possible, explique la vice-présidente. Elles sont d’ailleurs aujourd’hui toutes pourvues de facilitateurs formés à cet accompagnement." Avec le nouveau gouvernement, elle reconnaît un coup de pouce "formidable" pour le déploiement des MSP. "Mais face à l’explosion des demandes, les fédérations régionales doivent veiller à la qualité des services apportés sur le terrain afin d’assurer un développement performant des MSP", met-elle en garde.


Une entrepreneuse de terrain

Brigitte Bouzige est elle-même à l’initiative d’un regroupement sur son territoire. "Nous sommes en désertification médicale avérée, alors il y a quatre ans, je suis allée rencontrer le maire puis un des médecins pour leur faire part de mon inquiétude et des solutions à envisager." Aussitôt dit, aussitôt fait. Ensemble, ils décident d’organiser une réunion en invitant les professionnels de santé du territoire. "À la première réunion en 2013, une cinquantaine de personnes sont venues, et avant même que l’on commence, tout le monde échangeait dans la salle. Je savais que c’était gagné. C’était très encourageant." 

Un groupe se réunit pour parler accès aux soins, coordination, financement, mode de rémunération... "Mais beaucoup d’entre eux ne voulaient pas entendre parler de regroupement dans des murs, se rappelle Brigitte Bouzige. Nous avons donc commencé par une structure 'hors les murs'." Le pôle de santé Cévenol, dont elle est la présidente, a donc vu le jour et une maison de santé pluriprofessionnelle ouvrira à La Grand-Combe début mars. La MSP regroupe une vingtaine de professionnels de santé dans des locaux de 1 200 m2, avec un laboratoire de biologie médicale mais sans les pharmaciens sur place.

"Les pharmacies se doivent de respecter la population de proximité pour laquelle elles ont été désignées", estime Brigitte Bouzige. Elles font néanmoins partie du pôle de santé, partagent le projet de santé et multiplient les réunions de formation et de coordination en interprofessionnalité. "Ce qui me porte, c’est ma conviction que l’exercice coordonné des équipes de soins primaires, qu’elles soient en MSP ou non, représente l’exercice de demain. Et mon souhait est de partager cette conviction avec le plus grand nombre d’entre nous."

Bio express

1979 : doctorat en pharmacie

1986 : acquisition de son officine dans le Gard

2008 : présidente du Groupement Giphar

2011 : vice-présidente de l’USPO

2012 : vice-présidente de la FFMPS

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