Accidents de la route, de plongeon, de ski, de surf, de rugby, accidents de la vie, maladies neuromusculaires… L’hôpital Raymond-Poincaré de Garches (Hauts-de-Seine) est spécialisé dans la prise en charge d’adultes et d’enfants paraplégiques ou tétraplégiques dont le handicap est d’origine traumatique ou non. Ces patients, dont les séjours longs se comptent en mois, voire en années, ont besoin d’un soutien extramédical. C’est dans cette optique qu’intervient l’Association Point carré handicap (APCH) . Elle est née en 1959, sous l’impulsion d’un ancien patient, André Milesy, qui l’a dirigée jusqu’à son décès, en 2001. Cet ancien expatrié en Afrique, devenu tétraplégique, a réuni un groupe de patients de l’hôpital autour d’un projet original : la création d’un journal, Le Point carré (voir encadré), encore diffusé aujourd’hui.

L’association a progressivement étendu ses activités pour accompagner les patients dans la durée. « Ce sont des personnes qui sont détruites psychologiquement, explique Nadine Vaugeois, employée multicasquettes de l’association. Notre but, c’est de les préparer à leur nouvelle vie dans un esprit de reconstruction globale du patient. » Cet accompagnement que propose l’APCH se traduit d’abord par un soutien pendant l’hospitalisation.

Une association intégrée à l'hôpital

L’APCH est localisée au sein de l’hôpital. Ses bénévoles vont au contact des patients et peuvent les accompagner dans leur cheminement, dans un rôle différent des soignants et de l’entourage : soutien moral, appui administratif, adaptation à la vie hospitalière. Mais son rôle va plus loin. Elle renforce aussi les capacités de soins de réadaptation de l’hôpital, dont les budgets sont limités. « Nous dépensons entre 50 000 et 60 000 euros par an pour l’hôpital, souligne Mounir Al Rafei, président de l’APCH. Nous finançons une partie de l’espace sportif à travers certains stages proposés par l’hôpital, ou du matériel. »

Sortir pour mieux guérir

L’association propose de nombreuses activités : des ateliers d’arts graphiques, des activités sportives. Tout ce qui permet aux patients de sortir des murs de l’hôpital est valorisé. Elle organise ainsi des sorties culturelles mais également des stages à la montagne ou au bord de la mer, où les patients peuvent s’essayer au rafting, à la plongée ou au char à voile.

« J’ai rencontré des patients qui rentrent tout juste du ski, raconte Mounir Al Rafei. Et je peux vous assurer qu’ils n’ont pas du tout la même expression sur le visage qu’avant de partir. » Un point essentiel, car la reconstruction des patients passe aussi par le moral. « Certains en veulent à la terre entière, d’autres se retrouvent seuls parce qu’ils perdent leur conjoint qui n’est pas prêt à vivre avec une personne handicapée », ajoute-t-il.

L’association profite également des rendez-vous de la vie civile pour réunir les patients autour de son équipe à l’occasion d’une galette des rois, de la fête de la musique, ou dès qu’un événement le permet. Les petites sorties viennent rythmer la vie hospitalière : les lundis cinéma, des dîners au restaurant… autant de parenthèses essentielles au moral des patients.

Sortir pour préparer l'après

Si l’APCH s’est donné comme mission d’améliorer la vie à l’hôpital, elle met aussi un point d’honneur à en préparer la sortie. Elle parle de « re-vie », d’adaptation à une nouvelle existence. Pour cela, elle dispose d’un outil indispensable : « Nous avons la chance de disposer de véhicules adaptés pour faire sortir les patients de l’hôpital », souligne Nadine Vaugeois. Des véhicules qui servent aux sorties mais aussi à réhabituer les patients à la vie civile. « Ils ont souvent peur de sortir, ils se sentent dans une situation d’infériorité liée à leur handicap, poursuit-elle. Grâce à ces véhicules, que nous prêtons aux familles, ils peuvent se préparer à leur nouvelle vie. »

Pour adoucir la transition, l’association organise également des sorties individuelles avec des bénévoles, en concertation avec les soignants et les éducateurs. Un kinésithérapeute ou un ergothérapeute peut aussi accompagner le groupe qui aide le patient à expérimenter son futur quotidien à domicile. Ils parcourent ensemble les trajets qui deviendront habituels, prennent les transports en commun, vont faire les courses, etc.

Hospitalisation, transition, nouvelle vie… L’Association Point carré handicap tente de donner de nouvelles perspectives de vie aux patients de l’hôpital de Garches. Mais, bientôt, elle devra déménager. En 2027, les activités de l’hôpital Raymond-Poincaré seront transférées, ce qui laisse planer un doute sur la pérennité de l’APCH. « Nous continuerons de travailler, précise Mounir Al Rafei. Nous sommes invités à discuter les nouveaux plans, et il est prévu que nous ayons des bureaux à l’hôpital Ambroise-Paré. »

Le mot du président, Mounir Al Rafei

« Le 3 août 2010 au matin, j’étais quelqu’un de très actif, de sportif, je courais des semi-marathons. Le 4 août, j’étais paraplégique. On ne fait jamais vraiment le deuil de ses jambes, mais le plus compliqué, lorsqu’on devient paraplégique ou tétraplégique, c’est le retour à la vie civile. Sortir de l’hôpital est une véritable angoisse. J’ai mis sept mois avant de sortir de mon domicile. Parce que c’est compliqué, mais aussi parce que cela fait peur et qu’il faut savoir accepter le regard des autres, ou même l’absence de regard des autres. L’Association Point carré handicap m’a accompagné à ce moment, et j’ai décidé de donner de mon temps en devenant trésorier, puis président il y a trois ans. L’APCH existe depuis soixante ans. Elle a été créée par André Milesy, dont l’empreinte est toujours vive, alors qu’il est décédé depuis presque vingt ans. Son épouse est d’ailleurs toujours membre de l’association, et pour vous dire à quel point il l’a marquée de son empreinte, la société dans laquelle il travaillait nous subventionne toujours à hauteur de 7 000 euros par an ! Son héritage se ressent également dans le magazine trimestriel, Le Point carré, que nous continuons de diffuser. Si nous n’avions regardé qu’à la dépense, nous aurions pu interrompre sa diffusion. Mais c’est notre étendard, et son contenu est très intéressant. D’ailleurs, n’hésitez pas à vous abonner, c’est seulement 18 euros par an ! En plus de son contenu éditorial, il propose quelques pages de publicité pour les professionnels qui servent à nous soutenir financièrement. »

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