21 millions de passages par jour aux services des urgences des hôpitaux en France. Parmi eux, certains reviennent régulièrement, parfois pour des pathologies chroniques ou des problèmes sociaux complexes. Porté par la DGOS, DAUM – dispositif d’accompagnement pour les utilisateurs multiples des urgences – repère et accompagne ceux qu’on appelle les utilisateurs fréquents des urgences (UFU). Ces derniers ne sont pas forcément pris en charge de manière adéquate car leur demande est quelquefois incomprise et souvent banalisée du fait de leur passage répété aux urgences.  

"Ce dispositif est une première en France, souligne Romain Hellmann, conseiller médical et directeur de la politique médico-soignante de l’ARS Grand Est, et urgentiste au CHU Bichat Claude Bernard (AP-HP). Il s’inspire de modèles qui existent aux Etats-Unis, au Canada et en Suisse. En France, nous avons plutôt une réflexion sur comment vider les urgences, c’est une réflexion par l’offre de soins. Or avec Daum, nous abordons les urgences avec un autre prisme à savoir celui du comportement de consommation. C’est une approche complémentaire de l’existant qui nous permet de détecter un comportement de consommation et d’apporter une réponse au patient. Car derrière une demande répétée de soins, il y a souvent une autre demande à laquelle il faut apporter une réponse adaptée, sinon nous passons à côté." Le dispositif, expérimenté de novembre 2022 à novembre 2023 et financé par le Fonds d’intervention régional (FIR), est aujourd’hui en place au quotidien pour Nancy et sa périphérie.  

 

Détecter, comprendre et accompagner

Concrètement, à son 4e passage* dans l’année au service des urgences du CHRU de Nancy, le patient est identifié et automatiquement recontacté par le DAC (dispositif d’appui à la coordination) 54 (Meurthe-et-Moselle) qui lui propose, avec son accord, un rendez-vous à son domicile. Le premier rendez-vous se fait en général avec un médecin et une infirmière, recrutée à temps plein pour le dispositif. Selon sa situation ou sa pathologie, le patient se voit proposer un plan d’actions via un Plan personnalisé de coordination en santé (PPCS) avec les différents acteurs de la ville. À partir de l’analyse des quatre dossiers des urgences issus du système d’information, on cherche à obtenir le maximum d’informations pour analyser le parcours de la personne et essayer de comprendre son comportement. Le but est aussi de connaître son milieu de vie et de prendre contact avec son cercle de soins.  

Une fois ces informations récoltées, tout type de service peut être envisagé : une hospitalisation à domicile, une mise en contact avec un travailleur social, une structure d’aide à domicile, un juge... "Le but du dispositif est de mieux comprendre ces malades complexes, précise Romain Hellmann. Ils peuvent avoir des addictions, des maladies chroniques sous-jacentes, connaître des conditions socio-économiques modestes et avoir un médecin traitant. Mais ils passent sous les radars ! Le but est de les accompagner, d’avoir un impact global et de donner du sens à leur parcours en activant tout l’écosystème des acteurs de santé." Et pour cela, il faut bien connaître cet écosystème.  

Dans le Grand Est, le DAC 54 répondait à tous les critères comme ceux de disposer d’une équipe pluriprofessionnelle et d’assurer une bonne articulation avec tous les acteurs du soin et du médico-social. Aujourd’hui, le dispositif qui s’est fixé comme objectif une réduction de 20 % du nombre de passages aux urgences des UFU est en cours d’évaluation et les résultats sont attendus pour début 2025. "Il ne faut pas chercher à transposer le dispositif in extenso, ajoute Romain Hellmann. Il faut l’adapter car nous sommes dans l’humain. Il faut trouver à chaque fois le bon acteur qui a les compétences reconnues pour cette mission." Cela peut être un DAC, une CPTS ou un PASS en fonction du territoire. Mais toujours dans l’objectif d’apporter une réponse globale à une personne en l’orientant vers un parcours de soins adaptés grâce à un réel "continuum ville-hôpital".  

 

NOTE 
1. Trois classes d’âge sont davantage concernées par une utilisation fréquente des urgences : les 0-2 ans, les 20-30 ans et les plus de 65 ans. Le nombre de 4 passages, issu de la littérature scientifique, a été retenu dans l’expérimentation, mais il pourrait passer à 6 pour les deux premières classes d’âge selon les résultats obtenus.  

 

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