"À voir le retard pris par l’univers soignant sur le champ du développement durable, rien ne semble plus éloigné de l’environnement que le monde du soin... Pourtant, rien n’en dépend autant que ce dernier. Car la biodiversité est au coeur de notre système de santé : l’aromathérapie ou la phytothérapie sont des exemples emblématiques de cette utilisation des trésors de la nature à des fins médicales. Nos pharmacies en sont un autre exemple : une bonne part des médicaments dont nous disposons actuellement sont dérivés de plantes, d’animaux ou de micro-organismes. Sans entrer dans un catalogue à la Prévert aussi volumineux que surprenant, n’oublions pas que les antibiotiques nous viennent de diverses moisissures, que de nombreux traitements contre le cancer ont été extraits de plantes ou d’arbres, que de très nombreux antalgiques ont été découverts dans les végétaux : l’aspirine dans le saule, la morphine dans le pavot, et peut-être demain dans les animaux...

Mais la biodiversité peut aussi s’exprimer directement dans les soins. L’usage des sangsues, tombé en désuétude vers le milieu du XXe siècle, revient en force : les asticots, introduits dans les plaies, jouent le rôle de précieux auxiliaires pour les soignants, ou encore le miel, utilisé dans quelques établissements hospitaliers pour ses propriétés cicatrisantes...

Mais alors que nous n’avons découvert qu’une petite portion de l’extraordinaire étendue du monde du vivant et de son incroyable richesse, elle s’érode à grande vitesse. Car la planète a déjà connu des épisodes d’extinction massive, dont le dernier en date remonte à 65 millions d’années, conduisant à la disparition de nombreuses espèces, dont les dinosaures. Et, aujourd’hui, c’est l’homme qui est responsable de l’épisode en cours...

Il ne viendrait à personne l’idée d’incendier la seule pharmacie de son village... C’est néanmoins ce que l’humanité réalise actuellement dans l’indifférence générale. Même le monde des soignants, qui s’alarme régulièrement de la perte d’efficacité des dernières classes d’antibiotiques, ne semble pas s’émouvoir de cette terrible réalité. Pire, avec un usage trop peu attentionné de désinfectants ou d’antibiotiques, ils participent directement à l’apparition d’antibiorésistance et à la préoccupante perturbation d’un monde microbien dont la complexité est à la hauteur de notre ignorance : extrême ! Nous connaissons pourtant, grâce aux découvertes les plus récentes, les incroyables fonctions liées à la diversité de notre microbiote intestinal. La protection de la biodiversité et des extraordinaires richesses qu’elle recèle devrait être au coeur de l’action de chaque soignant..."

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