Article publié dans Concours pluripro, septembre 2023
 

Il se rêvait rockeur. Un souhait qu'il a poursuivi pendant près de six ans, à défaut de passer le bac, après s'être "fait virer" de son lycée peu de temps après le suicide de son père. "J'étais fils d'instituteur, élevé dans une mairie… J'en ai gardé un profond attachement pour les valeurs républicaines", confie ce Vosgien d'origine et Breton d'adoption. Et il l'avoue : dans un premier temps, son rapport aux études a été compliqué, notamment parce que son père avait décidé qu'il devait avoir un an d'avance. "J'ai beaucoup ramé et j'ai toujours été moyen", reconnaît-il.

Après s'être consacré quelque temps à la musique avec sa bande de copains, il reprend le chemin du lycée à 23 ans, obtient son baccalauréat, passe le concours de médecine dans la foulée et décroche la 33e place sur environ 1 000 candidats. "J'étais fier de moi, car finalement j'avais de la ressource !" Et la suite devient plus simple, "à partir du moment où l'on est sur les rails…" Une réussite qui lui donne une autre vision du monde médical, dont les membres, estime-t-il, "pensent souvent être au-dessus des autres alors que, finalement, le chemin est facile dès lors que l'on est encadré". Et, au fil des années, son rapport à ses confrères ne s'est pas nécessairement apaisé, puisqu'au moment de l'internat, tout le monde "ne jurait que par les spécialités et personne ne comprenait mon souhait de devenir généraliste".

 

Concurrence entre médecins

En sixième année d'études, il s'occupe de sa première fille tout en passant les examens qui lui permettent de choisir ses stages pour deux ans. Il opte volontairement pour la médecine générale. Et part à Lorient, où son maître de stage l'autorise à effectuer des remplacements "alors que je venais tout juste d'arriver". En 1990, à Lanester, il multiplie les gardes de nuit, tout en rénovant des maisons, "ce qui m'a apporté l'équilibre pour m'éclater dans mon travail". Après dix ans de remplacement, Éric Henry décide de s'installer à Auray, une petite ville du Morbihan. Mais alors qu'il envisage de le faire dans des locaux communs avec son épouse, généraliste également, il se retrouve avec les papiers du divorce en main. Mais il ne recule pas. C'est même le début de son attachement à l'interprofessionnalité…

En 2001, il est élu à l'URML Bretagne, sous l'étiquette du Syndicat des médecins libéraux (SML). "L'URML s'engageait dans le montage d'une maison médicale de garde à Rennes. J'ai voulu porter le même projet à Auray, mais je n'ai été soutenu ni par l'URML ni par l'Ordre." Il ne se démotive pas pour autant et passe trois mois à appeler tous ses collègues du territoire. Et certains décident de le suivre. "Je suis un chef d'entreprise dans l'âme, et l'organisation des gardes sur le territoire n'était pas optimisée. En raison d'une concurrence entre les médecins, on bousillait notre vie personnelle pour une dizaine d'actes par garde. Nous nous devions de devenir complémentaires." Sa patience finit par payer, puisque la maison médicale de garde d'Auray est créée en 2004. Ses projets prennent ensuite de l'ampleur lorsque son confrère William Joubert, actuel président de l'Union nationale des professionnels de santé, l'encourage, en 2008, à se lancer dans l'interprofessionnalité.

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