Droit et gestion

Droit

Taxes foncières, relations avec les Ordres professionnels, responsabilité pénale, questions relatives à l’immobilier ou la gestion des locaux, statuts d’une société, refus de soins, fiscalité et retraite… Un éclairage juridique sur les questions relatives à votre pratique individuelle ou collective.

Notre Expert
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Nicolas Loubry
Juriste

Juriste spécialisé en droit de la santé, ancien responsable du département de protection juridique au sein du Groupe MACSF, auteur de plusieurs ouvrages, guides et articles sur la gestion du cabinet médical, sur les questions déontologiques, juridiques et fiscales que se posent les professions médicales.

Fidèle collaborateur du Concours Médical depuis de nombreuses années, Nicolas Loubry a une connaissance et une expertise des problématiques rencontrées par les professionnels de santé en matière d'installation, de modes d'exercice, de gestion, de responsabilité ou d'assurances.

Vous avez une question relative à votre exercice, la gestion des locaux, vos droits et devoirs... ? Notre expert vous répond.

L'expert vous répond

Expert
Exercice médical

En période d’épidémie, la médecine de soins doit-elle être privilégiée ?

- 15 mai 2020 -

Les professionnels de santé étant particulièrement mobilisés et souvent en première ligne dans la prise en charge des patients, il semble logique de ne pas les exposer à d’autres tâches moins urgentes, qui peuvent être différées.

Il en va notamment de la médecine d’expertises, qui va à l’encontre des mesures de confinement car nécessitant un contact direct et donc présentiel. Interrogé sur la pratique des expertises médicales pendant la pandémie de Covid-19, l’Ordre a incité « sans aucune ambiguïté à arrêter temporairement toute activité d’expertises médicales (hors du cadre très particulier de la télé-expertise) nécessitant un contact présentiel entre le médecin et la victime, que cela soit au cabinet médical ou au domicile de la victime ».

Secret professionnel

Un médecin, lorsqu’il accepte d’être filmé pendant ses consultations et ses interventions chirurgicales, peut-il être condamné pour violation du secret professionnel, s’il concourt à la divulgation de l’identité et de l’état de santé de son patient ou de sa patiente ?

- 15 mai 2020 -

Selon l’article R.4127-4 du code de la santé publique, « le secret professionnel institué dans l’intérêt des patients s’impose à tout médecin dans les conditions établies par la loi. Le secret couvre tout ce qui est venu à la connaissance du médecin dans l’exercice de sa profession, c’est-à-dire non seulement ce qui lui a été confié mais aussi ce qu’il a vu, entendu ou compris ».

Dans un arrêt du 26 septembre 2018, le Conseil d’État a condamné un médecin à deux ans d’interdiction d’exercice, dont un an assorti du sursis pour avoir notamment méconnu cet article en contribuant à la divulgation de l’identité de patientes à l’occasion d’émissions de télévision ou d’articles de presse, et bien que ces patientes aient consenti à la révélation de leur identité et sciemment recherché la médiatisation. Pour le Conseil d’État, le consentement des patients s’avère sans influence sur le délit de violation du secret médical.

Une position que ne partage pas la Cour de cassation qui, au contraire, a jugé, dans un arrêt du 19 février 2009, « que des informations couvertes par le secret médical ne peuvent être communiquées à un tiers sans que soit constaté l’accord de la victime ou son absence d’opposition à la levée du secret, de sorte qu’une CPAM ne pouvait être contrainte de communiquer à une société (employeur) de telles informations ».

Statut juridique

L’activité exercée par un médecin dans le cadre d’un groupement de coopération sanitaire (GCS) constitué avec un établissement de santé est-elle subordonnée à une autorisation préalable du conseil départemental de l’Ordre ?

- 15 mai 2020 -

Comme l’a récemment précisé un arrêt du Conseil d’État du 2 mars 2020, il revient au seul directeur général de l’agence régionale de santé (ARS) d’approuver la convention constitutive d’un groupement de coopération sanitaire de moyens entre un établissement de santé et un professionnel de santé libéral. Elle précise notamment l’identité de ses membres ainsi que les conditions d’intervention des professionnels médicaux libéraux.

Il s’agissait, dans cette affaire, d’un médecin spécialiste, qualifié en pathologies cardiovasculaires, exerçant à titre libéral à Caluireet- Cuire (Rhône). Il avait constitué un GCS avec le centre hospitalier de Bourgen- Bresse (Ain) dans le cadre duquel il était appelé à pratiquer, à raison d’une demi-journée par semaine, la cardiologie interventionnelle au sein de cet hôpital. Une opposition à cette installation de confrères, membres d’un groupement de coopération sanitaire concurrent, était à l’origine de ce recours.

Réglementation de la profession

Le fait, pour un chirurgien, de changer son mode d’intervention, en ne prévenant son patient qu’au bloc opératoire, est-il répréhensible ?

- 15 mai 2020 -

Le tribunal administratif de Melun, dans un jugement du 20 septembre 2019, a condamné un chirurgien pour avoir décidé de changer d’intervention, passant d’une opération par voie endovasculaire à une chirurgie ouverte, en prévenant son patient une fois que celui-ci a été installé dans le bloc opératoire, sans lui expliquer les bénéfices et les risques d’une telle intervention, alors même que ce patient avait exprimé son refus pour une opération ouverte.

Rémunération & fiscalité

Les consultations de nature médicale effectuées par téléphone, par des professionnels médicaux et paramédicaux, sans contact physique, doiventelles être soumises à la TVA ?

- 15 mai 2020 -

Dans un arrêt du 5 mars 2020, la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a considéré que les prestations fournies par téléphone, notamment par les infirmières et assistants médicaux, consistant en des conseils relatifs à la santé et aux maladies, sont susceptibles d’être exonérées de TVA si elles poursuivent une finalité thérapeutique.

Ethique professionnelle

En cas d’épidémie, un médecin exerçant à titre libéral, comme d’autres professionnels de santé, peut-il se prévaloir d’un droit de retrait si les mesures de protection sanitaire lui semblent insuffisantes ?

- 15 mai 2020 -

La pénurie de masques, de blouses de protection ou encore de gel hydroalcoolique, pour ne prendre que quelques exemples récents, peut conduire un médecin à vouloir fermer son cabinet et interrompre ses consultations ou ses visites. Pour ne pas prendre un risque pour lui-même et ses proches, mais aussi pour ses patients qu’il pourrait contaminer.

Le médecin doit toutefois respecter l’article L6315-1 du code de la santé publique qui rappelle que « la continuité des soins aux malades est assurée quelles que soient les circonstances. Lorsque le médecin se dégage de sa mission de soins pour des raisons professionnelles ou personnelles, il doit indiquer à ses patients le confrère auquel ils pourront s’adresser en son absence ». Un médecin a toujours le droit de refuser ses soins pour des raisons professionnelles ou personnelles, mais il doit systématiquement en avertir son patient et transmettre au médecin désigné par celui-ci les informations utiles à la poursuite des soins.

Secret professionnel

Des grands-parents peuvent-ils porter plainte devant l’Ordre contre un médecin pour la rédaction d’un certificat mettant en cause leur fils ?

- 16 avril 2020 -

Un médecin généraliste remet à la mère d’une enfant un courrier adressé à un pédopsychiatre affirmant la forte probabilité que le père de cette enfant aurait commis des actes d’exhibitionnisme vis-à-vis de sa fille. Le courrier est ainsi rédigé : « Cher confrère, je vous confie en urgence l’enfant Léonore L., 4 ans, qui tient des propos depuis quelques jours d’exhibitionnisme de son père. Elle m’a cité les événements avec beaucoup de précision. Même s’il s’agit d’une enfant très éveillée, je ne pense pas que l’affabulation soit de mise. Merci pour votre diligence... »

Les parents du père (et grands-parents de Léonore), à la lecture de ce courrier, ont décidé de porter plainte contre ce médecin généraliste, s’estimant victimes par ricochet de son certificat, alors que ce praticien n’avait procédé à aucun signalement.

En première instance, l’Ordre régional de PROVENCE-ALPES-CÔTE D'AZUR-Corse a rejeté leur plainte, l’estimant irrecevable « pour défaut d’intérêt à agir ». Ces grands-parents décident de faire appel, et la chambre disciplinaire nationale de l’Ordre des médecins va leur donner raison, dans une décision du 20 septembre 2016.

L’Ordre national va considérer que le courrier litigieux de ce médecin pouvait avoir des répercussions sur la situation, sur l’équilibre psychique de l’enfant et sur la restriction des possibilités de contact entre le père et sa fille, et entre ces grands-parents et leur petite-fille. L’appel de ces grands-parents va donc être jugé recevable, et le médecin condamné à trois mois d’interdiction d’exercice avec sursis.

Pour sanctionner ce praticien, l’Ordre national a tenu à rappeler « qu’un médecin, lorsqu’il établit un certificat, ou rédige un courrier, doit se borner à faire état des constatations médicales effectuées ; que, s’il peut rapporter des dires relatifs aux causes de l’affection, de la blessure, constatée, il doit veiller à ne pas se les approprier, alors surtout qu’il n’aurait pas été à même d’en vérifier la véracité ». Et l’Ordre d’ajouter que ce médecin, dans son courrier litigieux, « lequel ne fait état d’aucune constatation médicale, d’une part, exprime l’opinion selon laquelle les dires de l’enfant ne sont pas des affabulations, d’autre part, ne mentionne aucun élément sur lequel s’appuierait cette opinion », alors même que le dossier ne fera apparaître aucun élément permettant de regarder comme établis, ni même comme fortement vraisemblables, les faits relatés par l’enfant ; cette relation n’a d’ailleurs pas fait l’objet de signalement. Pour l’Ordre, ce médecin a ainsi méconnu les dispositions des articles R.4127-28 et R.4127-51 du code de la santé publique, rappelant qu’un médecin ne doit pas délivrer un rapport tendancieux ou un certificat de complaisance et s’immiscer dans les affaires de famille.

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Nicolas Loubry
Juriste

Juriste spécialisé en droit de la santé, ancien responsable du département de protection juridique au sein du Groupe MACSF, auteur de plusieurs ouvrages, guides et articles sur la gestion du cabinet médical, sur les questions déontologiques, juridiques et fiscales que se posent les professions médicales.

Fidèle collaborateur du Concours Médical depuis de nombreuses années, Nicolas Loubry a une connaissance et une expertise des problématiques rencontrées par les professionnels de santé en matière d'installation, de modes d'exercice, de gestion, de responsabilité ou d'assurances.

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