Dans une affaire jugée par le Conseil d’État le 15 juin 2022, le Conseil national de l’Ordre des chirurgiens-dentistes avait suspendu un praticien du droit d’exercer l’art dentaire pour une durée de six mois au vu des signalements de deux patients et d’un étudiant en chirurgie dentaire relatant que l’état de santé de ce praticien semblait obérer sa capacité à exercer sa profession, de la circonstance qu’il a rédigé une ordonnance prescrivant à un patient un médicament appartenant à la classe des benzodiazépines dont la prescription relève de la compétence exclusive des médecins, et de son comportement, révélant un défaut de maîtrise et une tendance à l’emportement. En application de l’article R4124-3 du code de la santé publique, ce chirurgien-dentiste a fait l’objet d’une expertise qui ne lui était pas défavorable, mais l’Ordre a toutefois jugé que l’état de santé de ce praticien rendait dangereux l’exercice de sa profession.
Saisi en dernier recours, le Conseil d’État en a jugé autrement après avoir toutefois rappelé "que le rapport d’expertise a pour seul objet d’éclairer l’instance ordinale et ne la lie pas pour l’appréciation, qui lui incombe, de l’existence éventuelle d’un état pathologique rendant dangereux l’exercice de la profession". Cependant, le Conseil d’État a considéré qu’au regard de l’ensemble des éléments qui lui étaient soumis, l’Ordre avait fait une application inexacte des dispositions de l’article R4124-3 en retenant que ce praticien, à la date de la décision, présentait un état pathologique rendant dangereux l’exercice de sa profession. En effet, les experts avaient considéré que la principale pathologie dont souffre ce chirurgien-dentiste, pour laquelle il fait l’objet d’un suivi régulier par plusieurs praticiens spécialistes de celle-ci, était stabilisée et connaissait une évolution favorable. Les trois experts ont ainsi conclu, de manière unanime, notamment au vu de leur examen clinique, de bilans biologiques et de certificats concordants des médecins assurant le suivi régulier de ce praticien, qu’il ne présentait pas, à la date de cette expertise, un état pathologique rendant dangereux l’exercice de sa profession.