Article publié dans Concours pluripro, octobre 2025
 

CAS DE DEPART : Mme L., 24 ans, consulte son médecin généraliste pour une récidive douloureuse d'ongle incarné au niveau du gros orteil droit. L'examen retrouve une lésion de stade 3, avec une inflammation locale, un écoulement clair et un bourgeon charnu. La patiente décrit un parcours caractéristique d'errance thérapeutique courante. Ainsi, les soins conservateurs et le passage aux urgences avec prescription d'antibiothérapie n'ont pas apporté de solution curative satisfaisante. Elle est adressée au cabinet de podologie pour une prise en charge par phénolisation.

L'ongle incarné – du latin unguis incarnatus – ou onychocryptose – du grec kruptos, caché – est une pathologie fréquente, douloureuse et invalidante qui touche souvent les adolescents et les jeunes adultes. Il représente un motif courant de consultation en médecine générale (20 % des consultations abordant le pied, selon une étude publiée en 2020), en dermatologie, en podologie et en chirurgie orthopédique. Le traitement varie selon le stade de gravité, allant des soins locaux à la chirurgie partielle de la matrice unguéale.

Au pôle de santé Les Allymes (Auvergne-Rhône-Alpes), la phénolisation de l'ongle incarné fait l'objet d'un protocole local de coopération entre le podologue et le chirurgien orthopédiste, un dispositif qui permet à un professionnel de santé de réaliser un acte ou une activité habituellement pratiqué par un autre :

Photo avant intervention de Mme L. On y observe une onychochryptose sur le bord latéral de l'hallux avec botriomycome associé
Photo avant intervention de Mme L. On y observe une onychochryptose sur le bord latéral de l'hallux avec botriomycome associé.

 

Rappels physiopathologiques

L'ongle incarné résulte de la pénétration du bord latéral de l'ongle dans les tissus périunguéaux, entraînant une inflammation, un oedème, parfois une infection. Il résulte d'un conflit entre l'ongle et le repli latéral. Parmi les facteurs favorisants : une mauvaise coupe d'ongle, un chaussage inadapté, une dystrophie unguéale (ongle en éventail, ongle en tuile), un conflit entre l'hallux et le deuxième orteil (hallux valgus, crosse distale de P2) et une hyperhydrose.

Il est important de bien connaître l'anatomie unguéale afin de comprendre les tenants et aboutissants du traitement de l'ongle incarné. La matrice unguéale est une structure qui s'étend en amont du repli proximal et latéralement à celui-ci, formant des cornes matricielles. Une particularité anatomique qui explique l'apparition de spicules dans certaines chirurgies. De plus, l'avulsion simple de l'ongle ne le détruit pas de manière définitive. Il faut enlever en totalité la matrice sous-jacente chirurgicalement ou par agent chimique.

La classification de Mozena définit les différents stades de l'ongle incarné :

– stade 1 : douleur, érythème, sans granulation ni écoulement ;
– stade 2a : inflammation avec hypertrophie tissulaire latérale ;
– stade 2b : écoulement purulent ou granulations, récidives possibles ;
– stade 3 : hypertrophie importante du repli unguéal, fibrose, ongle déformé.

Si le traitement conservateur est recommandé au stade 1 – avec des bains antiseptiques, une mise en décharge, une orthonyxie, une orthoplastie (séparateur siliconé sur mesure) –, aux stades 2 et 3, une matricectomie partielle chimique ou chirurgicale est indiquée. La phénolisation est l'acte de choix dans les stades 2b et 3.

 

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