Synopsis : Nour (interprétée par Zita Hanrot) vient d’être embauchée comme infirmière en santé au travail dans l’usine chimique Arkalu où travaille son père Slimane (Sami Bouajila), délégué syndical et pivot de l’entreprise depuis toujours. Alors que l’usine est en plein contrôle sanitaire, une journaliste (Céline Sallette) mène l’enquête sur la gestion des déchets. Les deux jeunes femmes vont peu à peu découvrir que cette usine, pilier de l’économie locale, cache bien des secrets. Entre mensonges sur les rejets polluants, dossiers médicaux trafiqués ou accidents dissimulés, Nour va devoir choisir : se taire ou trahir son père pour faire éclater la vérité. Le film n’épargne ni la direction, ni les syndicalistes, ni les politiques, ni la médecine du travail dans la complexe somme de responsabilités qui leur revient. Il démonte les mécanismes qui conduisent à cette omerta.

D’où vient Rouge ? Le réalisateur Farid Bentoumi se confie dans le dossier de presse : "Au départ, j’avais imaginé une histoire semblable chez des éboueurs, un milieu qui n’est jamais traité au cinéma. Mais le milieu professionnel de la gestion des déchets est aujourd’hui très surveillé et contrôlé, il n’y a plus d’affaires de pollution, donc plus d’actualité. En me documentant sur ces questions de déchets, je suis tombé sur l’histoire de l’usine de Gardanne (Bouches-du-Rhône) qui rejette ses déchets toxiques dans la Méditerranée, des boues rouges. Cela fait plusieurs années que le gouvernement et la préfecture leur demandent d’arrêter de polluer la mer. Mais cette usine, c’est aussi 500 emplois à la clé, ce qui n’est pas rien dans un endroit comme Gardanne déjà marqué par le chômage. Lorsque j’ai vu les photos de cette usine et ses boues rouges, j’ai trouvé ça très frappant en termes cinématographiques. J’ai transposé mon histoire dans ce type d’usine qui existe aussi ailleurs dans le monde. Je me suis ensuite beaucoup documenté sur d’autres histoires d’usines polluantes, d’autres destins de lanceurs d’alerte". Rouge n’est donc pas un documentaire, c’est une fiction, librement inspirée de différents faits réels.

Il poursuit : "Ce film porte une dimension autobiographique. Les usines qui polluent, qui ferment, les ouvriers qui doivent déménager du jour au lendemain, le chômage, les 3/8, on a vécu tout ça. Mon père est parti à la retraite à cause d’un accident du travail, certains de ses amis sont morts de l’amiante… Je n’ai pas fait Rouge en enquêtant de loin sur la condition ouvrière, c’est du vécu".

L'héroïne du long-métrage, une infirmière de santé au travail, est une "Antigone moderne", selon le réalisateur, qui signe aussi le scenario. Elle refuse que les rejets polluants tuent les espèces locales, abîment la santé des ouvriers, et elle pense à juste titre qu’elle a son mot à dire. "L’engagement de Nour se situe là, dans cette prise de parole des femmes. Nour est infirmière, et dans son métier aussi les médecins lui font la leçon, et c’est intéressant qu’une infirmière prenne la parole. Souvent, les lanceurs d’alerte occupent des petits postes, ouvrier, intérimaire, informaticien, ce ne sont pas des cadres supérieurs. Rouge dit qu’à n’importe quelle place hiérarchique dans la société, on peut donner de la voix, dénoncer une injustice."

 

Rouge, de Farid Bentoumi, en salles.

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