Fondée le 25 mars 1938 par un patient diabétique, maître Paz, avocat et homme politique, pour que "tous puissent avoir accès à l’insuline", reconnue d’utilité publique en 1976 et agréée en 2007, l’Association française des diabétiques, dirigée par des patients dès 2003 (auparavant, par des professionnels de santé) s’est muée en Fédération française des diabétiques (FFD) en 2015. Elle se veut "force de proposition et de contestation, mais son positionnement est de consulter et dialoguer avec tous", explique son président Gérard Raymond. Elle agit pour améliorer la vie des patients.

Elle a créé en 2015 un living lab dédié au diabète (Diabète Lab), doté en 2018 d’une base de données de santé sécurisées. Récemment, fruit d’une réflexion décennale après les directives européennes sur le permis de conduire, et en accord avec le ministère de la Santé, le ministère de l’Intérieur et la Délégation à la sécurité routière, elle a obtenu que l’aptitude au permis de conduire, jusqu’alors attribué pour trois ou cinq ans par un médecin agréé, relève du médecin traitant ou du diabétologue.

60 000 participants aux EGDD

Les États généraux du diabète et des diabétiques (EGDD), sous la houlette d’un comité stratégique et d’un comité de suivi, ont été menés à travers neuf dispositifs : 70 ateliers citoyens locaux et 15 réunions publiques régionales (600 propositions concrètes), une cartographie de l’offre de soins sur tout le territoire (programmes d’éducation thérapeutique, centres d’initiation aux pompes à insuline, rétinographes, adhésion au service Sophia, programme Élan solidaire organisé par la FFD, etc.) et le recueil d’une centaine d’expériences pour faire émerger les spécificités territoriales; deux enquêtes (Mon diabète et moi, et Comprendre le vécu des proches) pour recueillir le vécu de 22 000 patients ; la 7e semaine nationale de prévention du diabète et une plateforme en ligne (40 000 visiteurs, 12 420 votes, 2 000 propositions) pour mobiliser les citoyens ; trois forums politiques (diabète et travail), une centaine d’auditions d’experts, des tables rondes, pour coconstruire les politiques de santé avec les représentants nationaux, recueillir les attentes de l’ensemble des acteurs de premier et second recours.

Un an plus tard, la FFD formule des propositions en trois axes (informer de manière fiable ; améliorer la prise en charge de proximité ; fonder la qualité sur l’évaluation "patient") pour bâtir un système de santé plus respectueux des personnes. Gérard Raymond résume : "Nous voulons des recommandations pour traiter les personnes", cette démarche étant complémentaire de la médecine fondée sur les preuves. Le Dr Jean-François Thébaut, membre du comité stratégique des EGDD et du conseil d’administration de la Fédération, d’ajouter : "L’humanisme est un prérequis en médecine, mais il paraît souhaitable de replacer cette notion au premier rang", au-delà de l’empathie nécessaire lors de l’annonce de cette maladie chronique silencieuse pour laquelle "il faut transmettre la notion de risque, les complications sévères représentant une épée de Damoclès", et qui requiert un changement d’hygiène de vie ("Un patient diabétique de type 2 correctement traité a la même espérance de vie qu’un non-diabétique.")

"La médecine personnalisée, c’est le bon traitement au bon patient, en fonction du contexte, des objectifs et des préférences du patient… ce qui suppose qu’il soit bien informé. Décider ensemble de traitement le plus adapté, c’est le gage d’une plus grande efficacité et d’une meilleure tolérance." Améliorer la prise en charge nécessite donc d’étayer l’éducation thérapeutique, de renforcer la coordination des acteurs, de financer le parcours de soins de manière globale pour permettre une action dans le temps (forfait diabète aux Pays-Bas).

Éduquer à la santé, lutter contre les discriminations

Pour "mettre en place, coordonner, financer et évaluer une politique d’éducation à la santé permettant à chaque citoyen de préserver son capital santé", il s’agit de rendre obligatoire l’éducation à la santé, notamment à l’école par la loi Éducation et école de la confiance, car expliquer la nutrition aux enfants scolarisés sensibilise, par ricochet, les familles à une saine alimentation. Cette 1re proposition renvoie au projet "Comportement alimentaire des adolescents : le pari de la santé (CAAPS)" à Strasbourg et à la 8e proposition : "Considérer l’activité physique et la diététique comme une thérapie à part entière du diabète".

Pour "réviser les textes législatifs et réglementaires sur l’emploi des personnes diabétiques au regard des progrès technologiques et thérapeutiques" (5e proposition), la FFD envisage la création en 2019 d’un comité interministériel (selon les textes en vigueur depuis 1950, les patients diabétiques ne peuvent devenir pilotes de ligne, personnels navigants, aiguilleurs du ciel, pompiers, douaniers, marins ; bien qu’elle soit championne du monde de karaté, Alizée Agier a dû renoncer à la police nationale à cause de son diabète de type 1) et la création en 2020 d’un statut intermédiaire pour les diabétiques en affection longue durée leur permettant de s’absenter dans le cadre du suivi qu’impose leur maladie (lorsque le diabète est bien équilibré et sans complication, la reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé n’est pas justifiée).

Selon l’enquête "Mon diabète et moi", une personne diabétique sur quatre a dû renoncer à un nouveau poste de travail ou à de nouvelles responsabilités. Chacune des propositions (encadré) fait l’objet d’une fiche (contexte, enjeux, expériences, actions souhaitées). La FFD les fera évoluer en fonction de son projet stratégique 2019-2022.

Les autres propositions

> Améliorer la qualité des produits industriels et donner aux citoyens les capacités de faire des choix éclairés.

> Mesurer l’impact génétique et épigénétique des déterminants sociaux et environnementaux sur l’apparition du diabète.

> Améliorer la connaissance et le repérage des personnes à risque de diabète de type 2.

> Renforcer les capacités des patients à s’approprier les informations concernant leur santé afin de prendre avec leurs professionnels de santé les décisions adaptées à leur situation.

> Définir le cadre réglementaire d’un accompagnement de qualité pour les patients.

> Construire une offre de soins adaptée aux besoins de chaque patient.

> Redéfinir les rôles et les compétences des acteurs de proximité afin de restructurer l’organisation territoriale.

> Faciliter le quotidien des patients en favorisant les consultations à distance et le télé-suivi.

> Prévenir et prendre en charge les complications du diabète en développant des organisations spécifiques.

> Intégrer la qualité de vie des patients dans l’évaluation des technologies de santé (médicaments, dispositifs médicaux).

> Promouvoir l’évaluation du système de santé avec les patients pour plus de qualité et de sécurité.

> Donner les moyens à la démocratie sanitaire de s’exercer.

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