Comme l’expliquait Agnès Buzyn lors d’une récente conférence(1) "les communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) auront la responsabilité de couvrir un territoire, tous les acteurs du territoire travaillant ensemble pour offrir un parcours de soins coordonné". Avec un rôle équivalent à celui des pôles de santé multi-sites : coordination des acteurs, réponse aux difficultés d’accès aux soins non programmés, amélioration de la prévention, développement de l’attractivité de l’exercice libéral, et d’autres missions encore à définir. En outre, "on pourra financer d’autres missions proposées à l’initiative des professionnels eux-mêmes", précise la ministre de la Santé.

Le 16 février dernier, lors de la 6e Journée de la Fémasif, sur le thème des "Maisons de santé pluriprofessionnelles (MSP) à l’épreuve du territoire", le Dr Didier Ménard, son président, qui trouve "difficile d’associer le soin à la personne et, en même temps, de travailler avec le social et le médicosocial", conférait aussi aux CPTS l’intérêt d’aider les MSP à surmonter "l’épreuve du travail en lien avec le territoire". D’autant que "leur création ne signifie pas que celle des MSP ne continue pas !" rassurait Pierre Ouahnon, directeur adjoint à l’offre de soins de l’ARS Île-de-France(2), pour qui, avec les CPTS, l’offre de soins de ville est plus resserrée, donc plus visible à ses partenaires (l’hôpital contactera plus facilement 3 ou 4 CPTS que 80 partenaires différents !) : "Il n’y aura pas de retour en arrière dans cette logique, mais sans mobilisation des acteurs, on ne pourra pas mettre en place une politique territoriale."

En lien avec l'ARS-IDF et l'Assurance maladie

Cette approche territoriale en santé s’opère en lien étroit avec l’Assurance maladie, qui a déjà planché sur les protocoles pluriprofessionnels avec la FémasIF, et mis en place des référents MSP dans ses caisses, selon Ugo Bernanini, chef de projet à la CPAM-IdF, qui envisage aussi des "animateurs territoriaux" au sein des caisses, et un accompagnement plus global des MSP pour donner aux porteurs de projets une vision précise de l’offre de soins et des priorités de santé dans un territoire. Certes, "les MSP ont vocation à être à l’origine des projets des CPTS, mais il faut aussi susciter des CPTS là où il n’y a pas de MSP pour éviter les zones blanches". Monter une CPTS avant de créer une MSP ? Hector Falcoff, médecin généraliste, qui, à défaut de voir aboutir son projet de MSP, a expérimenté le pôle de santé Paris-13, transformé en CPTS, le vit aujourd’hui comme "une chance".

Pour Julien Mousquès(3), directeur de recherche à l’Irdes, qui place les CPTS au-dessus de la MSP, "leur gouvernance doit être représentative des structures participantes pour prendre les bonnes décisions". Qui en est membre ? "Ce n’est pas open bar !", sachant que certains la coconstruisent et d’autres se contentent de l’utiliser. À Gand (Belgique), tous les acteurs sont recensés : santé, justice, police, logement, éducation, etc. La CPTS que préside Hector Falcoff dans le XIIIe arrondissement de Paris, inclut pour sa part Génération 13 (groupe de marche avec 600 adhérents seniors)… Ses conseils : aller voir "tous les acteurs un par un"(4) ; se centrer sur 3 ou 4 projets, adaptés aux ressources, pour couvrir un champ significatif ; partir de ce que les gens ont envie de faire, "un vrai levier" ; rétribuer les réunions ; tabler sur dix ans. Ainsi, estime-t-il, "le centre de gravité du système va se déplacer vers la ville. Mais on est au début de quelque chose qui mettra des années à se développer".

1. Organisée par le Groupe santé de Sciences Po Alumni et Sciences Po, 20 février 2019.

2. Première ARS à avoir diffusé en 2017 un guide pour accompagner les professionnels de santé dans leurs projets de création de CPTS. 

3. Chevillard G., Mousquès J. "Accessibilité aux soins et attractivité territoriale : proposition d’une typologie des territoires de vie français". Irdes 2019.

4. Liste sur ameli-sante, répertoire opérationnel des ressources.

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