"Le passage aux urgences d'une personne âgée et fragile pour des raisons qui sont davantage en lien avec une difficulté de maintien à domicile ou un problème social non anticipé qu'avec une urgence de santé peut majorer certaines pathologies", souligne Charles Charani, médecin généraliste à Croix et président de la CPTS de la Marque, qui s'étend au nord-ouest de Lille entre Wasquehal et Villeneuve d'Ascq. Et si "ces personnes ont des troubles cognitifs, cela peut les aggraver. Elles passent de longues heures dans le service pendant qu'on leur cherche de la place ou elles retournent chez elles la nuit et entrent dans une spirale infernale" qui peut altérer leur autonomie de manière durable. Pour le médecin et son équipe, ces passages aux urgences pourraient être évités si les situations qui les provoquent étaient anticipées. Ils ont donc imaginé un parcours de soins spécifique qui repose sur une infirmière de liaison. Un dispositif présenté aux dernières Rencontres, innovations et pratiques à Lille, le 12 octobre dernier

L'infirmière pivot

"La personne la plus présente autour de la personne âgée à son domicile, c'est l'infirmière, explique le médecin. Elle y passe une fois, deux fois voire trois fois par jour. C'est elle qui appelle le médecin quand il est nécessaire qu'il passe voir la personne. C'est elle parfois qui va à la pharmacie avec l'ordonnance pour prendre ses médicaments. C'est aussi elle, souvent, qui téléphone au kiné... Elle a un rôle majeur mais qui n'est pas reconnu et valorisé." Le projet mis en place par la CPTS de la Marque vise à y remédier et à l'organiser.

Le parcours commence avec la proposition faite au patient d'être pris en charge par une équipe pluridisciplinaire. Avec son accord, l'infirmière de liaison contacte ensuite les professionnels de santé de son "premier cercle" – le médecin traitant, le pharmacien habituel et le kiné le cas échéant – et leur propose de participer à la prise en charge coordonnée du patient. Dès qu'ils sont partants, l'infirmière évalue les éventuels troubles cognitifs du patient, ses éventuels problèmes de santé mentale, de nutrition ou de mobilité. Elle évalue aussi ses éventuelles douleurs proprioceptives ou neuropathiques.

De son côté, le pharmacien établit un bilan de médication du patient (traitements, effets secondaires, risque iatrogénique, etc.). L'infirmière organise ensuite une réunion de concertation pluridisciplinaire (RCP) des professionnels de santé du premier cercle, au domicile du patient au moins la première fois (possiblement en visio par la suite). "Le patient voit toute l'équipe et les professionnels apprennent aussi à se connaître", remarque Charles Charani. Ensemble, ils décident d'un protocole de prise en charge que l'infirmière de liaison aura la responsabilité d'animer. Celui-ci peut comprendre le rythme des prises de sang, des mesures de la tension, de la saturation, du poids, de la glycémie, etc., tout comme, si le besoin est identifié, l'intervention d'autres professionnels : diététicienne, psychologue, ergothérapeute, pédicure-podologue ou autre. "Comme certains ne sont pas remboursés par la Sécurité sociale, le coût de leurs interventions est pris en charge par la CPTS qui dispose d'une enveloppe dédiée", souligne Charles Charani.

RETOUR HAUT DE PAGE