Article publié dans Concours pluripro, octobre 2023

Pourquoi créer une inter-CPTS ?

Généralement, l'objectif est d'offrir un cadre aux CPTS pour s'entendre et gérer des dossiers communs à l'échelle interdépartementale. Par exemple, "la sphère d'intervention d'un hôpital est nécessairement plus grande que le secteur d'une seule CPTS. De fait, dès lors que des liens ville-hôpital sont noués, les projets discutés vont embarquer plusieurs CPTS dans la prise de décisions, sans parler des objectifs communs à atteindre", précise Pascal Dureau, médecin généraliste, secrétaire général de la CPTS de Vénissieux, trésorier de l'inter-CPTS départementale 69, et secrétaire général de l'i-CPTS Auvergne Rhône-Alpes.

En fonction des territoires, ces thématiques communes concernent la gestion du SAS ou encore des crises sanitaires, tel que prévu par l'ACI. "Sur ce dernier point, c'est l'inter-CPTS qui a rédigé le plan. La structuration de nos dispositifs est donc désormais homogène. Ainsi, si la préfecture déclenche un plan blanc, toutes les CPTS fonctionneront de façon identique avec des cellules de crise et des pharmacies référentes pour le stockage des médicaments", précise-t-il. Des actions de prévention sont également déployées à l'échelle de l'inter-CPTS lorsqu'elles sont notamment en lien avec les établissements hospitaliers du territoire.

L'inter-CPTS permet aussi aux professionnels de santé de mutualiser leur travail dans le cadre du déploiement de programmes tels qu'Icope ou pour la prise en charge du cancer du sein. "Autant partager entre nous les réflexions et les déploiements déjà mis en oeuvre afin que nous n'ayons pas à repartir de zéro si d'autres professionnels du territoire ont déjà réfléchi à la mise en oeuvre de mêmes projets", assure-t-il.

En Charente, la création de l'inter-CPTS a eu vocation, à l'origine, de répondre préalablement à un autre besoin. Le département fait partie de ceux ayant eu rapidement un grand nombre de MSP constituées. "De fait, nous avons pris plus de temps pour mettre en place des CPTS", reconnaît Jean-Philippe Brégère, pharmacien en officine, vice-président de la CPTS Pays d'Angoulême et trésorier de l'inter-CPTS 16. Plusieurs professionnels de santé représentatifs à l'échelle du département ont réfléchi conjointement au déploiement des CPTS sur le territoire. C'est dans ce cadre qu'est née l'inter-CPTS 16, association loi 1901, début 2020. "Nous l'avons créée pour penser au découpage territorial le plus pertinent pour les CPTS", expliquet-il, précisant avoir obtenu de l'ARS un financement du Fonds d'intervention régional (FIR), pour recruter une chargée de mission aidant au déploiement des CPTS.

Depuis que le département en est couvert, l'inter-CPTS se concentre sur d'autres thématiques, notamment la rédaction de protocoles et la mutualisation de projets avec les centres hospitaliers. Parmi les thématiques gérées à cet échelon : les sorties hospitalières ou l'amélioration de la couverture vaccinale. C'est également l'inter-CPTS qui est présente au sein du conseil territorial de santé. "Sa mission est purement opérationnelle", précise-t-il.

Qu'est-ce qu'une inter-CPTS ?

Il n'existe pas de cadre juridique pour la création des inter-CPTS. Pour autant, sur le territoire, celles constituées prennent souvent une forme associative. "Il est toujours possible de monter un groupement de coopération sanitaire, mais la gestion va être plus lourde, pointe Pascal Dureau. À l'origine, comme on craignait des enjeux de pouvoir, on n'était pas nécessairement favorables à la constitution d'une structure associative pour l'inter-CPTS. Mais l'ARS et les CPAM nous ont demandé une représentation officielle, avec un interlocuteur identifié... Nous avons donc sauté le pas."

Comment mettre en place une inter-CPTS ?

Les professionnels de l'inter-CPTS 69 ont commencé à penser à cette structuration début 2022, de manière informelle, par des échanges sur un groupe WhatsApp et en partageant des documents sur un drive. "On s'est réuni une vingtaine de fois avant de formaliser la création de l'inter-CPTS, se souvient Pascal Dureau. Mais nous avions déjà l'habitude de travailler ensemble." C'est seulement en avril 2023 que l'association a été créée. Aujourd'hui, l'inter-CPTS regroupe 14 des 18 CPTS constituées sur le territoire.

"Les quatre restantes, situées dans le nord du département, n'ont pas souhaité nous rejoindre car elles disposent de leur propre organisation." Pour autant, les inter-CPTS n'ont pas vocation à être des entités excluantes. Il est d'ailleurs possible d'être membre de plusieurs inter-CPTS en fonction de l'organisation territoriale et des bassins de vie.

Quel fonctionnement en interne ?

"Lorsque des décisions doivent être prises, soit on est tous d'accord, soit ce n'est pas le cas et on discute, indique Pascal Dureau. À force d'échanges, on parvient généralement à s'entendre. Il ne faut pas oublier qu'on a tous la même mission et le même cadre d'exercice. Nos intérêts et nos finalités convergent. Il n'y a pas d'enjeu de pouvoir et on ne souhaite pas qu'il y en ait. On cherche donc l'accord de tous et le compromis. Nous restons une association de coordination, nous n'empiétons pas sur la liberté de chaque CPTS à prendre ses propres décisions."

Les professionnels échangent tous les deux mois ou à la demande, lors d'une réunion en visioconférence ou en format mixte. "Nous nous invitons dans nos CPTS respectives, pour apprendre à mieux nous connaître", fait-il savoir.

En Charente, le fonctionnement est davantage informel puisque "nous avons un groupe WhatsApp entre les dirigeants des CPTS membres et les chargés de mission, sur lequel nous prenons les décisions, confie Jean-Philippe Brégère, précisant que l'AG a lieu une fois par an. Il est important que le fonctionnement reste informel, au risque de devenir un repoussoir."

Quels garde-fous faut-il poser ?

Les deux professionnels de santé s'entendent pour dire que la mise en place d'une inter-CPTS implique de la souplesse et de la patience. "J'ai mis un an à la monter", fait savoir Jean-Philippe Brégère. "Il ne faut pas vouloir être pressé car les gens sont toujours un peu méfiants par rapport aux tentations de pouvoir, prévient Pascal Dureau. Il faut donc se laisser le temps d'apprendre à se connaître et à se faire confiance. Par exemple, dès le départ, on savait qu'il fallait créer une association, mais on s'est laissés entre un an et un an et demi... Le temps des fiançailles, avant celui du mariage."

i-CPTS : un échelon supra

En Auvergne-Rhône-Alpes, les professionnels de santé ont créé un échelon supérieur à l'inter-CPTS, à savoir l'i-CPTS Aura. Cette inter-CPTS des CPTS de toute la région est composée des représentants de chaque département, cooptés dans chaque inter-CPTS. La formation interprofessionnelle est la principale thématique gérée à cet échelon. "Depuis septembre, nous déployons la formation sur la régulation des demandes de soins non programmés", explique Pascal Dureau. Cette formation est financée par l'Organisme gestionnaire conventionnel. L'i-CPTS Aura devrait également obtenir une aide de l'ARS et de l'Assurance maladie pour la formation des coordinateurs et des dirigeants, au sein de l'EHESP, portant sur l'organisation, la responsabilité employeur, le management ; autant de thématiques et de compétences auxquelles les professionnels de santé ne sont pas nécessairement formés.

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