Le ton est donné ! Depuis trois mois, les professionnels de santé des neuf communes de la Métropole européenne de Lille – qui constitue le territoire de 75.000 habitants de la CPTS Vallée de la Lys (Hauts-de-France) – a trouvé un moyen innovant pour sensibiliser les patients à la présence de médecins sur le territoire. Comment ? En imprimant directement sur des sacs à baguettes et des sacs à pharmacie les slogans "Trouver un médecin ne mange pas de pain" et "Maintenant que t'as les médocs, trouve un doc !". Objectif : aller chercher les 5% de patients sans médecin traitant sur son territoire, explique à Concours pluripro Thomas Maunoury, médecin généraliste, vice-secrétaire de la CPTS Vallée de la Lys, et co-responsable des missions "Soins Non Programmés et accès médecin traitant". "Le nouveau bureau de la CPTS de taille 2 a repris la gestion depuis trois ans. Et nous avons déterminé, avec la CPAM, les deux missions socles : gérer les soins non programmés et faciliter l'accès à un médecin traitant", détaille-t-il.

Crédit : CPTS Vallée de la Lys

Après avoir dressé le bilan auprès de ses 145 adhérents et des différentes villes qu'elle couvre, le bureau de la CPTS s'est rendu compte que leur zone était "assez peu impactée par les patients sans médecin traitant. Nous avons deux fois moins de ce type de patients comparé au reste de la France", poursuit le médecin. En effet, selon l'Assurance maladie, ce territoire compterait 5% de patients sans médecin traitant, une moyenne bien en-deçà du niveau national (11%). "Nous nous sommes donc demandé où se trouvaient ses fameux patients sans médecin traitant."

Pour autant, ce territoire moins désertifié que d'autres compte tout de même une "zone plus désertifiée", précise Thomas Maunoury. "Certains médecins ont plus de mal à proposer des rendez-vous urgents alors que sur la commune de Comines, nous y arrivons assez facilement. L'idée, finalement, a été de mettre en adéquation les moyens à notre disposition avec les demandes des patients."

L'objectif de cette initiative est donc de répondre à la méconnaissance des patients, qui "ne savent pas que des médecins généralistes prennent de nouveaux patients", mais aussi des professionnels de santé, notamment les pharmaciens, "qui ne savent pas vers qui adresser les patients", précise le médecin. "On s'est aperçus que les dispositifs d'accès aux soins étaient assez mal connus alors qu’on se trouve dans un pays qui bénéficie d'un grand accès à la santé... Plusieurs patients nous indiquent qu'ils n'ont pas réussi à trouver de rendez-vous, qu'aucun médecin ne prenait de nouveaux patients sur Doctolib, qu'ils ont dû appeler le 15 pour obtenir un rendez-vous. Pourtant, on a des solutions : on propose des gardes 7 jours sur 7 jusqu'à minuit et on conserve des créneaux de consultations pour les urgences."

 

Sur le modèle du violentomètre

Sur ses 145 adhérents, la CPTS compte plusieurs dizaines de médecins. "Avec eux, nous avons souhaité réfléchir à une organisation plus intelligente qui permette à tout le monde d'y prendre part." L'organisation repose donc sur la régulation du 15 et du Service d'accès aux soins (SAS), et sur "les dizaines voire les centaines de créneaux réservés tous les jours pour des patients qui seraient régulés par le SAS et qui auraient besoin de voir un médecin en urgence ou dans la journée", rapporte Thomas Maunoury.

Mais la véritable question concernait la communication de ces informations auprès du grand public et des autres professionnels de santé. "Initialement, on avait pensé aux réseaux sociaux mais cela ne toucherait que les personnes connectées qui ne sont pas nécessairement celles qui en ont le plus besoin..." D'autant que le territoire, de par sa proximité avec la Belgique, compte de nombreux travailleurs étrangers mais aussi beaucoup de travailleurs agricoles venant de Pologne ou du Maghreb, qui peuvent rencontrer plus de difficultés pour contacter un professionnel et avoir un rendez-vous. "Tout le monde achète du pain ou va acheter des médicaments quasiment tous les jours", sourit le généraliste. La CPTS Vallée de la Lys va alors s'inspirer du violentomètre, un outil pour prévenir et sensibiliser contre les violences faites aux femmes, qui avait été imprimé sur les sacs à baguettes dans différents départements de l'Hexagone en collaboration avec des mairies, les préfectures, les collectivités.

crédit : CPTS Vallée de la Lys

"Nous avons demandé aux boulangeries de nos neuf communes s'ils étaient d'accord pour distribuer ces sachets, idem pour les pharmaciens." Sur ces sacs, toutes les informations nécessaires : numéro de téléphone de la coordinatrice de la CPTS, adresse du site internet, la référence sur Doctolib, mais aussi les consignes à respecter : contacter son médecin traitant et/ou le cas échéant, composer le 15 pour obtenir des conseils médicaux ou une orientation. "Nous avons trouvé au moins une boulangerie partenaire dans chacune des neuf villes. Même si certaines avaient déjà des contrats engagés sur ces fameux sacs, beaucoup se sont dit très intéressées et partantes. Ils sont le relais de nos actions."

Au total 25.000 sacs à baguette et 25.000 sacs à pharmacie ont été imprimés, soit un total de 50.000 sacs, "ce qui permettra d'avoir du stock et de diffuser les informations sur plusieurs années", souligne le médecin. Des impressions qui auront coûté 4.000 euros à la CPTS, une somme financée grâce à son ACI.

 

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