Article publié dans Concours pluripro n°8, octobre 2021, p. 22.

En quoi une modification du financement, qui se détache de la tarification à l’acte, pourrait favoriser la prévention ?

Sandrine Danet : On a vu à partir de l'exemple de l'obésité qu'une partie des activités de prévention n'étaient pas remboursées par l’Assurance maladie (diététiciennes, psychologues, activité physique adaptée). Nous avons alors formulé des propositions visant à intégrer la prévention dans un cadre de financement de droit commun, conditionné à l’insertion dans un plan de soin protocolé et coordonné. L’entrée dans un tel programme ne peut se faire qu’au sein d’une organisation pluriprofessionnelle. Les équipes coordonnées sont les mieux placées pour développer ces protocoles, qui feraient l’objet d’un financement spécifique.

La prévention la plus efficace doit toucher l’ensemble de la population… Comment s’assurer de cette universalité ?

Le système de soins est conçu pour les personnes qui s’adressent aux professionnels de santé. La lutte contre les inégalités sociales de santé est fondamentale, et notamment dans le champ de la prévention. Il faut développer « l’aller-vers », pour atteindre tous les publics, mais en même temps, s’interroger sur nos limites : jusqu'où le système de santé peut-il aller sans être liberticide ? Une réponse est à chercher du côté de l'action locale : il est important de pouvoir s'appuyer sur les collectivités locales et les professionnels de santé du territoire. Associer les soignants au contrat local de santé (CLS) est une bonne piste. Le format des CPTS pourrait permettre de développer cette coordination entre acteurs.

L’exercice isolé, qui a longtemps été le modèle dominant, est-il un frein au développement de la prévention ?

Il faut nuancer un peu cette affirmation : les consultations des médecins généralistes ont toujours compris des messages, voire des prescriptions liées à la prévention. Cependant, il a manqué une organisation en protocoles, à partir de référentiels, évalués grâce à des données probantes. Historiquement, l’Assurance maladie finançait uniquement le soin curatif. Elle s'est investie progressivement dans les actions de prévention centrées autour du patient, comme la vaccination ou le dépistage. Aujourd’hui, elle prend en charge des parcours coordonnés, favorisés par l’exercice pluriprofessionnel sous différentes formes. Cependant, la prévention la plus efficace se fait en amont du système de santé : elle concerne l'alimentation, l'activité physique etc. Cette prévention collective ne relève pas de l’Assurance maladie, ni des équipes de soins, mais bien d’une volonté politique plus globale.

 

RETOUR HAUT DE PAGE