Si la première pierre vient d’être posée dans les établissements de santé par un amendement à la loi Ségur - lequel propose l’intégration de la dimension d’écoresponsabilité dans le projet d’établissement afin de définir une trajectoire pour réduire leur bilan carbone -, il n’en demeure pas moins que l’ampleur du défi à relever en vue de parvenir à une véritable intégration du développement durable dans le système de santé soulève néanmoins des questions plus fondamentales que celles touchant aux seules questions de gouvernance. En effet, malgré la volonté des pouvoirs publics et la participation de nombreux acteurs en la matière dans le domaine de la santé, le développement durable reste le parent pauvre du système au regard des investissements lourds et parfois de long terme qu’il requiert (notamment envers la réhabilitation des locaux parfois vétustes), dans un contexte de restructuration et de maîtrise des dépenses des établissements de santé et médico-sociaux.
Il reste paradoxal de constater que les lieux où l’on se préoccupe le plus de la santé des personnes, à savoir les établissements de santé et médico-sociaux, sont aussi ceux où les préoccupations écologiques ont peu le droit de cité. Pourtant, le développement durable est inhérent à la qualité et de la sécurité des soins : du traitement des déchets d’activités de soins à risques infectieux à la construction d’immeubles à Haute Qualité Environnementale, le développement durable participe à une dynamique d’amélioration et d’efficience des établissements. Si cette prise de conscience est affirmée, le monde de la santé doit davantage s’emparer de son rôle et de son implication dans le développement durable, afin de continuer à améliorer la santé publique et d'atténuer le changement climatique et ses effets sur la santé. La lutte contre le changement climatique, la reconquête de la biodiversité, l’utilisation parcimonieuse et pertinente des ressources, la réduction des risques sanitaires environnementaux sont autant de défis dont le monde de la santé doit investir.
La durabilité ne peut se résumer au seul prisme de la lutte climatique et des enjeux de gestion de déchets. Pour être significatif, le développement durable mérite d’être appréhendé selon une approche globale, laquelle intègre également ses dimensions économique et sociale. Sous l’effet conjugué de l’efficience des établissements et d’une réduction des coûts en masse salariale, il s’est ainsi accumulé ces dernières années, un infléchissement significatif des risques psychosociaux des professionnels de santé et une précarité des situations sociales, révélateurs des limites du mode de pilotage actuel des établissements. Parler développement durable, c’est donc intégrer l’ensemble de ces dimensions : sociale, économique et environnementale. Cette première dimension tend à mettre à disposition de tous, les biens essentiels au développement de façon pérenne de la population visant à combattre l’exclusion des individus et à établir un système d’équité. La dimension économique tend à promouvoir des relations et des échanges équitables, objectifs à long terme et de répartition des fruits de la croissance pour le plus grand nombre. La dimension environnementale prend en considération les ressources naturelles mais également humaine et humaniste intégrant la connaissance et les savoirs des individus.