Julie Dupouy est médecin généraliste à la MSPU de Pins-Justaret et professeure de médecine générale à la faculté de santé de l'université Toulouse-III-Paul-Sabatier
Article publié dans Concours pluripro, novembre 2023
Marie, 37 ans, agente immobilière, vient en consultation de médecine générale. Elle se plaint de fatigue et de troubles de la concentration. Son sommeil devient de plus en plus problématique, avec plusieurs réveils nocturnes. Elle se plaint aussi de troubles digestifs à type de ballonnements. Un bilan biologique avec NFS, bilan hépatique, fonction rénale et TSH est revenu normal. Son médecin généraliste la connaît peu pour l'instant, car elle ne l'a consulté que pour des affections aiguës virales. Cette patiente verbalise que sa relation avec l'alcool prend maintenant de la place dans sa vie quotidienne. Elle pense que son généraliste est la personne à qui elle en pourra en parler. Pour autant, elle se sent très coupable et craint d'être jugée.
Aborder la consommation d'alcool n'est pas toujours évident, tant pour les patients que pour les professionnels de santé. Pourtant, une relation de confiance existe entre le patient et ses soignants, notamment avec son médecin généraliste. Des études qualitatives ont exploré le ressenti des patients quand ils parlent de leur consommation d'alcool : ceux-ci sont en attente d'une attitude bienveillante et non jugeante. Par crainte d'une réaction négative, du jugement ou du déni du médecin, le patient emploiera souvent des motifs de consultation indirects pour aborder le sujet de l'alcool. La stigmatisation qui entoure cette maladie est, en partie, à l'origine du recours tardif aux soins de la part des patients, qui peuvent avoir honte – autostigmatisation – ou qui craignent d'être jugés.