Article publié dans Concours pluripro, février 2025

On le sait, les sorties d’hospitalisation sont, pour les soignants de ville, un sujet de récrimination sans fin à l’égard de l’hôpital. Mettre la main sur un compte-rendu d’hospitalisation, sur une ordonnance, savoir exactement quels actes ou examens ont été pratiqués au sein de l’hôpital et quand ils l’ont été… Tout ceci relève, aux yeux des acteurs des soins primaires, au mieux du jeu de piste, au pire du parcours du combattant. Avec, à la clé, des pertes de temps pour les professionnels de santé, des pertes d’argent pour les comptes publics et des pertes de chance pour le patient, car le spectre de la réhospitalisation n’est jamais loin. C’est pour résoudre ces difficultés – ou du moins pour en réduire la portée – qu’à Paris, le groupe hospitalier (GH) Sorbonne Université* a décidé de prendre le problème à la source, notamment en créant en son sein des équipes mobiles d’accompagnement aux parcours (Émap). Nous sommes allés à leur rencontre.

"Cela a commencé pendant le Covid", se souvient Adrienne Reix, coordinatrice médicale de la cellule Parcours au sein du GH et cheville ouvrière du dispositif. Cette urgentiste avait alors été chargée par l’hôpital Saint-Antoine de trouver une solution pour les patients que l’on appelle un peu péjorativement les bed blockers : ceux qui se trouvent dans l’établissement pour la seule raison que leur situation sociale ou familiale ne permet pas de solution alternative. "J’avais environ 300 patients, qui n’étaient pas forcément tous des bed blockers à proprement parler mais qu’il fallait rencontrer individuellement pour prendre le temps de faire ce qu’en général on n’a pas le temps de faire : comprendre les raisons du blocage, se souvient-elle. C’est ce qui a souvent permis de relancer une dynamique, de réimpliquer les médecins et d’identifier des pistes. » Les résultats ayant été jugés positifs, « j’ai été recrutée par la direction pour faire ce que j’avais déjà fait, mais à l’échelle du groupe", ajoute-t-elle.

Anticiper, anticiper, anticiper !

Parmi les outils mis sur pied depuis la pandémie se trouvent donc les Émap, qui sont "des équipes pluriprofessionnelles travaillant à la demande des services hospitaliers en appui aux parcours complexes", détaille Adrienne Reix. Concrètement, quand la sortie d’un patient s’annonce difficile, le service fait appel à cette cellule, qui tentera d’anticiper les choses, en lien avec tout un univers trop souvent mal connu des équipes hospitalières : hospitalisation à domicile (HAD), service de soins infirmiers à domicile (Ssiad), unités de soins longue durée (USLD), Ehpad mais aussi foyers d’accueil médicalisés (FAM), maisons d’accueil spécialisées (MAS), Samu social… Composées de trois personnes (deux infirmières et un urgentiste), deux équipes sont recensées à l’échelle du GH, précise Adrienne Reix : l’une à La Pitié-Salpêtrière et l’autre pour les hôpitaux Tenon et Saint-Antoine, chacune effectuant environ entre 200 et 250 interventions par an.

Et pour parvenir à trouver des solutions, les équipes doivent déployer un savoir-faire très particulier. "Nous trouvons des situations où un projet de sortie est défini mais ne parvient pas à aboutir, ou des situations complexes où le projet est à définir", explique Clémence Walkowiak, infirmière dans l’Émap de l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière. Celle-ci a remarqué que les équipes médicales connaissent assez mal les structures pouvant accueillir les patients en sortie d’hospitalisation et "ont tendance à demander des sorties en centre de rééducation même si le patient ne remplit pas tous les critères". Or, souligne-t-elle, tous les patients ne sont pas admissibles en rééducation, il y a des critères d’éligibilité assez stricts posés par les centres, et certaines situations peuvent s’éterniser.
 

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