Le 11 mars 2021, une partie des sénateurs étaient réunis autour de la Délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation du Sénat, lors d’une table ronde intitulée « Initiatives des collectivités territoriales en matière de santé ». L’objectif : amorcer les débats en vue d’un rapport qui sera rédigé par Phillippe Mouiller, sénateur des Deux-Sèvres et membre de la commission des affaires sociales, et Patricia Schillinger, sénatrice du Haut-Rhin.

« La crise sanitaire a montré l’enjeu d’avoir un service sanitaire proche de la population », a introduit Françoise Gatel, présidente de la Délégation. Et force est de constater que les collectivités ont répondu présent, faisant preuve de réactivité face à « l’impuissance d’un État très lointain, très ankylosé ». Mais la crise a aussi révélé des enjeux de gouvernance. Il est donc nécessaire, pour Françoise Gatel, de prendre connaissance des initiatives locales, mais surtout des blocages qui pourraient freiner leur mise en place.

Une affaire exclusive de l’État ?

Les communes, les départements et les régions ne sont pas totalement exclus : le maire est responsable de la salubrité publique de sa commune, les départements des centres de protection maternelle et infantile ou des Ehpads, et la région a la responsabilité d’un certain nombre d’établissements de formation de professionnels de santé, et peut faire de la prévention. Mais leurs compétences respectives sont limitées.

Olivier Renaudie, professeur de droit public à l’université Paris 1 qui était invité à ouvrir les débats lors de la table ronde, a notamment rappelé les ambiguïtés dans les responsabilités en matière de santé, sujet d’un article qu’il a récemment publié. La loi Santé de 2016 a imposé une vision « territorialisée » des politiques, comme le précise de Code de la santé publique. Mais, pour Olivier Renaudie, les collectivités ne sont pas réellement à la manœuvre. À travers les ARS, la santé n’a pas été territorialisée ou réellement décentralisée, mais seulement « déconcentrée ».

La santé publique étant l’affaire exclusive de l’État. « C’est ce qu’affirme sans ambages le Code de la santé publique », a-t-il notamment rappelé. Ce fait relève d’une appropriation historique de la question au fil des crises sanitaires, mais aussi d’un principe constitutionnel : l’égalité.

Ce blocage dans l’action législative, les maires l’ont ressenti pendant la crise. L’exemple de la ville de Sceaux (92) est parlant : un arrêté émis par le maire le 6 avril 2020, imposant le port du masque pour toute personne de plus de dix ans se déplaçant dans l’espace public, a été retoqué 11 jours plus tard par le Conseil d’État, sur « des arguments juridiques imparables ».

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