Article initialement publié sur reporterre.net*
À peine sortie de musicothérapie, Joëlle, les yeux turquoise, se pointe à la séance de jardinage. Organisé par l’Association communautaire santé bien-être (ACSBE), à Saint-Denis, l’atelier touche à sa fin. "Il y avait deux ateliers en même temps, s’excuse la retraitée. Mais la semaine dernière, j’étais là pour construire les bacs." Depuis deux heures, Zahra remplit les jardinières à mains nues et plante les herbes aromatiques, sur les conseils d’Alexandre et Ilan, de l’association partenaire Engrainage. Lounès, ancien maraîcher, est là également. Sous son béret, il doute du succès de l’opération : "Pas assez d’eau, pas assez de fond." Zahra, Lounès et Joëlle habitent le quartier du Franc-Moisin à Saint-Denis. Ils fréquentent l’association ACSBE et le centre de santé associé, La Place Santé.
Depuis 2011, l’établissement pratique "la santé communautaire". Développée dans les années 1970, cette approche consiste à organiser l’offre de soins en s’appuyant sur les besoins des patients à l’échelle d’une communauté territoriale. C’est dans cet esprit que La Place Santé (ACSBE) a ouvert ses portes en 2011. Suivie du Village 2 Santé à Échirolles en 2016 et du Château en santé à Marseille en 2018.
Dans ces centres, la santé se conjugue à plusieurs : médecins, paramédicaux, assistantes sociales ou encore associations accompagnent les usagers. "La santé communautaire postule qu’en impliquant les personnes au sein de leur communauté, elles pourront construire des réponses qui seront adaptées à leurs besoins", explique Cécile Fournier, spécialiste en santé publique à l’Institut de recherche et de documentation en économie de la santé (Irdes). Et tous les acteurs sont impliqués : des habitantes et habitants aux professionnels de santé, en passant par les associations, les élus ou encore les institutions.
"Nous avons construit les bacs à hauteur pour que les patients n’aient pas à se baisser et qu’ils ne se fassent pas mal au dos", explique Zahia, médiatrice à La Place Santé et responsable de l’atelier. La lombalgie a même fait l’objet d’un atelier, animé par une kinésithérapeute du quartier et un médecin. "Les arrêts de travail pour mal de dos sont fréquents chez nos patients", explique Sophie Naud, la coordinatrice de l’association. En cause : des emplois souvent « pénibles » ou des mères qui portent tout le temps leur enfant. L’objectif était notamment de donner à ces dernières des trucs et astuces pour préserver leur dos, ou le soulager. "L’atelier a bien marché. Ensemble, elles rigolent alors que seule, ce n’est pas pareil."