Avec les trois quarts de centres de santé dans le rouge, les résultats de cette enquête ne semblent pas, à première vue, en faveur du modèle de la médecine salariée. Et pourtant, en la commandant au cabinet de conseil ACE Santé et en la rendant publique, le Regroupement national des organisations gestionnaires de centres de santé (RNOGCS) a justement voulu démontrer que ce n’est pas tant l’organisation mais plutôt les modes des financements par l’Assurance maladie qu’il faudrait revoir en profondeur. "L’idée nous est venue car les rapports sur le modèle économique des centres de santé se sont succédé et nous ont toujours laissés insatisfaits, explique Hélène Colombani, présidente de la Fédération nationale des centres de santé (FNCS). Or, nous pensons que le mode de financement à l’acte n’est pas adapté à ce que nous faisons alors que nous sommes des organisations intermédiaires entre le cabinet libéral et l’établissement de santé." Un plaidoyer en prévision du prochain accord national 2025-2030 entre l’Assurance maladie et les organisations représentatives et dont les négociations devraient se tenir au second semestre 2024.  

"Cette étude a été, pour nous, un exercice de transparence, se félicite Alain Beaupin, président de l’Institut Jean-François Rey (IJFR). Elle vient confirmer deux choses : les centres tiennent bien leurs comptes et le modèle tarifaire n’est structurellement pas adapté." Sans prétendre à la représentativité, le panel intègre des centres de statuts différents (municipaux, mutualistes, associatifs). L’originalité est que ses auteurs ont épluché les comptes de l’exercice 2022 de 31 centres (8 centres de soins infirmiers, 8 centres de santé polyvalents et 15 centres de santé polymédicaux) avec l’objectif de distinguer la part des "faiblesses du modèle économique relevant du financement" et celle des "déficits que l’on pourrait imputer aux héritages et pratiques de gestion"

 

Presque tous déficitaires

S’agissant des centres polymédicaux, les taux de résultat net comptable sont tous – sauf un – déficitaires avec une médiane à -11,3 % et un centre accusant même un taux négatif de 82,4 %. Les subventions (de l’ordre de 2,4 % du chiffre d’affaires en médiane), permettent un léger correctif des déficits mais selon des proportions disparates (entre 0 et 41,3 % du CA). Quant à la part de financement relevant de l’accord national, elle représente une médiane de 8,2 % du CA (entre 2,9% et 27,9 %), probablement en lien avec le nombre de patients médecins traitants déclarés, d’autant que la médecine générale représente en moyenne 52 % du CA médical.  

Lire aussi : Centres de santé : à quand une vraie reconnaissance politique et financière ?  

Côté charges, ce sont les dépenses de personnels qui absorbent une très grande part les produits, voire les dépassent pour trois d’entre eux, la médiane étant de 88,4 %. Comme dans le secteur libéral, le CA moyen par équivalent temps plein (ETP) médical montre des écarts importants entre les spécialités : la radiologie, l’ophtalmologie, la cardiologie, la neurologie et la dermatologie rapportent le plus. Ce qui est plus surprenant est la disparité de CA rapportés par les ETP de généralistes. Ces différences qui ont logiquement des impacts sur les recettes des centres "interrogent la productivité, mais aussi sur d’autres facteurs de dégradation de la productivité comme le profil des patients", analysent les auteurs. 

Pour les centres de santé polyvalents, les résultats sont encore plus dégradés avec une médiane de taux de déficit à -18 % et une compensation par les subventions moindres (0,9 % du CA en médiane) de même que pour les financements au titre de l’accord national (5,8 % du CA en médiane). Pourtant, les charges de personnels sont un peu moins importantes (79,2 % des produits en médiane). À noter que dans ces centres, la médecine générale représente une part minoritaire (37 %) du CA produit. À l’inverse, les centres soins infirmiers présentent, eux, des bilans à l’équilibre, voire excédentaires. "Cet équilibre est notamment permis par un rapport charges de personnels/ produits de l’activité plus performant, et une relative maîtrise des charges indirectes et de structure dans l’ensemble de l’échantillon", soulignent les auteurs. 

 

RETOUR HAUT DE PAGE