Article publié dans Concours pluripro, juin 2024
 

En septembre 2018, lors de son discours sur la transformation du système de santé, Emmanuel Macron insistait sur le caractère "marginal" que devrait avoir progressivement l'exercice isolé et la nécessaire "coopération de l'ensemble des professionnels de santé au-delà des frontières de statut, de positionnement" car "les gens doivent se parler, s'organiser ensemble autour du patient". Des propos qui rejoignent ceux de Nadine Hialé, directrice de Présence médicale 64, un dispositif copiloté par le conseil départemental des Pyrénées-Atlantiques et l'ARS Nouvelle-Aquitaine : "Travailler en MSP, c'est ce que veulent de très nombreux soignants. Ce sont les nouvelles pratiques : l'exercice isolé n'attire plus autant."

Améliorer l'accès aux soins, favoriser l'installation de médecins généralistes dans le département et accompagner au quotidien les soignants dans leur projet professionnel et personnel... les missions portées par Présence médicale 64 traduisent la réalité du terrain : pour attirer des professionnels de santé, les territoires doivent miser sur un exercice de plus en plus collectif et de moins en moins cloisonné. Sous quelles formes s'exprime ce "pari" sur l'exercice coordonné ? Quelles initiatives ont un fort potentiel d'attraction ? L'exercice coordonné est-il devenu ce pôle magnétique d'attractivité pour les territoires délaissés ?

 

Ralentir la dégradation de l'offre

On a longtemps manqué de travaux pour étayer l'intuition selon laquelle la présence de structures d'exercice coordonné facilitait l'installation de professionnels sur les territoires. Cette lacune a commencé à être comblée, notamment avec les travaux de l'Institut de recherche et documentation en économie de la santé (Irdes) : en 2020, le géographe Guillaume Chevillard et l'économiste Julien Mousquès ont démontré, en analysant les 1 332 maisons de santé opérationnelles au 1er janvier 2020, que "les zones sous-dotées avec des maisons de santé connaissent une meilleure évolution de leur densité de médecins généralistes libéraux que celles sans maison de santé", avec un effet différencié en fonction des zones géographiques. "Si l'impact positif des maisons de santé sur la densité de jeunes médecins généralistes permet de stopper la dégradation de l'offre de soins dans les espaces péri-urbains, il permet seulement de ralentir la dégradation de l'offre dans les marges rurales", écrivent les chercheurs.

Malheureusement, les travaux dont on dispose à l'heure actuelle portent sur l'attractivité de l'exercice coordonné pour les médecins généralistes, et on manque de données en ce qui concerne les autres soignants. Julien Mousquès signale toutefois qu'au détour d'un travail sur la régulation de l'installation des infirmières libérales, "il n'a pas pu être trouvé de capacité des maisons de santé à être plus attractives que les autres modes d'exercice" concernant cette profession, notamment (mais pas uniquement) en raison du zonage des installations. Il ajoute également que des travaux en cours, non encore publiés, sur les masseurs-kinésithérapeutes montreraient "une certaine capacité des maisons de santé à attirer ces professionnels, mais là aussi brouillée par les limitations à l'installation qui existent".

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