Article publié dans Concours pluripro, mai 2025

 

Pendant deux ans, les maisons de santé de Plouay, de Pont-Scorff et de Quiberon (Bretagne) ont expérimenté un premier niveau d’ergothérapie en soins primaires sur le territoire du Morbihan, sur des situations problématiques à domicile. Objectif : démontrer la plus-value de l’ergothérapeute en exercice coordonné, notamment en favorisant le maintien à domicile, en améliorant la fluidité du parcours de soins ou encore en réduisant le nombre d’hospitalisations. Un diagnostic qui "permet de faciliter un diagnostic global de la situation de patients adultes en situation complexe", assure Soazig David, ergothérapeute. Installée à Inzinzac-Lochrist (Bretagne), elle est à l’origine de ce projet qui apporte une réponse "rapide et efficace" à des problèmes qui, traités avec du retard, freinent l’autonomie des personnes ou conduisent à l’aggravation de leurs pathologies, à des hospitalisations ou des départs du domicile...

D’autant que les délais de prise en charge et les difficultés de financement des actes d’ergothérapie – qui ne sont pas pris en charge – sont aussi des obstacles. "On se rendait compte qu’il manquait des éléments pour analyser les besoins des personnes, souligne Anne Rose, ergothérapeute libérale associée au projet. Et qu’il y avait une perte de temps et d’information importante. Réaliser un diagnostic ciblé permet de résoudre une situation, de mieux orienter la personne et de gagner du temps." Les diagnostics ciblés portent sur une difficulté précise. "On se penche sur les problématiques d’installation au fauteuil ou au lit, dans la dynamique de prévention des escarres et des rétractions orthopédiques, mais aussi des problèmes de la vie quotidienne relatives aux repas, à l’habillage ou la toilette", décrit Soazig David. Il s’agit donc d’une intervention de "premier niveau", précise-t-elle, mais pas d’un suivi.

Quand une problématique est identifiée par un professionnel de santé, elle est évoquée en réunion de concertation pluriprofessionnelle (RCP) avec l’ergothérapeute et, si validée, fait l’objet d’un bilan. Ainsi, sous quelques jours, l’ergothérapeute rencontre le patient à son domicile et évalue ses capacités et ses limitations fonctionnelles. "Le diagnostic vise à évaluer la situation de la personne sur les plans physique, cognitif mais aussi environnemental, matériel, mais également sous l’angle de ses habitudes de vie, explique Soazig David. On est dans une dynamique de résolution de problème et d’identification de ce sur quoi on peut agir." Les ergothérapeutes peuvent s’y rendre à nouveau pour réaliser des tests, des mises en situation avec des moyens de compensation. Et disposent d’un forfait de cinq heures d’intervention – financé sur les fonds ACI de la MSP – qui comprend la participation aux RCP, les visites à domicile et l’évaluation, la rédaction du diagnostic et sa restitution. Ces derniers sont ensuite partagés avec les autres professionnels de santé de la MSP.
 

L’heure du bilan

De fin 2022 à fin 2024, 34 personnes (via 82 visites à domicile) ont bénéficié du diagnostic de premier niveau par un ergothérapeute au sein d’une MSP, précise le rapport d’Alterergocare et du collectif ergolib 56 que Concours pluripro a pu consulter. La majorité d’entre elles avaient plus de 70 ans au moment de l’intervention et un tiers entre 70 et 79 ans. Un tiers des personnes souffraient d’une maladie neuro-évolutive (maladie de Parkinson, sclérose en plaques, maladie à corps de Lewy, etc.), et un peu plus de 75 % des situations ont été orientées par les médecins et les infirmières de la MSP. Parmi les situations rencontrées : problématique d’installation au fauteuil (26 %) ou liée aux activités de vie quotidienne (23 %), problématique architecturale (15 %) ou liée à la mobilité (12 %).
Lors de l’expérimentation, l’évaluation de l’ergothérapeute est allée "bien souvent au-delà" de la problématique indiquée, précise le rapport. Et 12 patients ont été orientés vers d’autres structures ou services spécialisés. Mais "l’un des éléments clés de cette expérimentation a été la collaboration étroite entre l’ergothérapeute et les autres membres de l’équipe", précise le rapport. Ces temps de coordination se sont faits en priorité avec les médecins, les infirmières et les kinés. Et plus d’un tiers des situations ont occasionné un temps de coordination avec un distributeur de matériel médical ou un pharmacien.

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