"Passer d’un exercice en solo, en face à face avec le patient, à un exercice en équipe, ça doit être admis par les usagers en premier lieu mais aussi par l’ensemble de l’écosystème de santé : les professionnels de santé, les décideurs, les ARS… et par notre système de financement." Pascal Gendry, coprésident d’AVEC santé, en est convaincu : c’est en équipe que les professionnels de santé pourront répondre aux besoins de prise en charge de patients de plus en plus chroniques et vieillissants, au sein d’un système de santé en souffrance. Cette notion d’équipe a d’ailleurs été le fil rouge de la journée régionale d’AVECsanté Nouvelle-Aquitaine, le 18 octobre dernier, à Bordeaux. Une journée "pour [se] recharger, pour renforcer [sa] confiance, pour partager [ses] expériences, [ses] réussites et même [ses] doutes", a assuré Victor Terraza,  son président.
 


 

Des doutes, Gérard Raymond n’en a aucun : "Le patient, il veut une réponse immédiate à son urgence. Et compte tenu de la démographie actuelle, cette réponse ne peut être portée que collectivement, a assuré le président de France Assos Santé, lors de la première table ronde de la matinée, animée par Karen Ramsay, rédactrice en chef de Concours pluripro. Aujourd’hui, le médecin généraliste ne peut plus être la seule porte d’entrée. Ça n’a plus de sens." En revanche, le professionnel qui introduit le patient dans le système de santé – quel qu’il soit – "doit être en coordination avec d’autres afin que se crée une dynamique d’équipe pour pouvoir partager de la compétence et de l’information, avoir de l’intelligence collective, s’améliorer chacun par la compétence de l’autre et apporter une réponse pertinente à ce patient".

 

"Chacun sa place"

Il ne s’agit pas d’opposer les notions de "médecin traitant" et d’"équipe traitante", insiste Pascal Gendry, car "au sein de l’équipe, chacun a sa place. Bien que la structuration et les pratiques de l’équipe permettent un partage de compétences sécurisé, chacun reste dans sa fonction et est repéré dans sa fonction par l’usager… C’est ce qui compte". Cette équipe doit-elle être à "géométrie variable", comme le pensent certains ? "Certains estiment qu’il n’est pas nécessaire d’être dans la même structure pour s’occuper des patients de manière coordonnée… mais disposer d’un système d’information commun, de protocoles et de formations communs, peut-être même d’assistants médicaux, d’infirmières d’équipe, de secrétariats communs, ce sont là des facteurs favorisants", ajoute le médecin généraliste installé à Renazé.

 

Pour valoriser le travail d’équipe, "il faut un cahier des charges et surtout un financement par une modalité particulière du prochain ACI-MSP, précise Laurence Tandy, médecin-conseil régional à l’Assurance maladie. Il faut également voir ce qu’on met dedans, à quoi cela correspond…On pourrait aussi sûrement s’appuyer sur les expérimentations Peps ou Ipep". D’autant que les retours sont "très positifs", glisse-t-elle, tout en assurant que "les professionnels sont prêts. Il y aura des réticents, il y en a déjà, et puis d’autres, qui sont convaincus de la valeur ajoutée de cette équipe de soins de proximité. C’est en marche, mais il faudra convaincre et montrer surtout que ça fonctionne".
Cette enveloppe globale doit être régulièrement revue et corrigée en fonction des résultats, de la satisfaction des professionnels et des patients, assure Gérard Raymond, qui veut voir le système de santé progresser vers "plus d’humanisme, de concertation et de coordination".

 

 

Cette "révolution culturelle" passe notamment par une refonte de la formation initiale : "Comment apprendre aux professionnels de santé à instaurer un colloque pluriel pour que le patient puisse s’exprimer et non simplement être à l’écoute des ordres donnés par le sachant ?" Une "urgence", confirme Dominique Dépinoy, président d’Acsantis. D’autant qu’au sein de l’équipe – dont fait partie l’usager –, "il y a un travail à faire sur la définition des rôles, qui ne sont pas seulement un champ de compétences professionnel, explique le médecin de formation. Qu’est-ce que j’aime faire ? Est-ce que je peux tenir une position de leadership ? Il faut s’appuyer sur des protocoles, des procédures et mettre en commun nos moyens entre MSP, CPTS, DAC, ESP, ESS, DAC… On pourrait réfléchir à une incitation à la collaboration de ces entités qui sont totalement complémentaires, à condition d’être bien menées", assure-t-il. À ses yeux, le "pari" de transformer les soins primaires ne sera réussi qu’en pro- posant "des indicateurs de qualité au bénéfice des parcours patient… et aujourd'hui, on est un peu en arrière là-dessus".

 

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