Voilà dix-sept ans que, sous le ministère de Jean-François Mattéi, une évolution des métiers de la santé a été initiée, sous la forme des "expérimentations Berland" pour lesquelles une quinzaine d’initiatives avaient été identifiées et, en quelque sorte, accompagnées et analysées. Cela concernait notamment des infirmières, diététiciennes, manipulateurs radio et orthoptistes. Mais le ministère était tombé, un rapport de la Haute Autorité de santé avait été produit et les pesanteurs, résistances et corporatismes avaient figé les choses… à l’exception notable des infirmières Asalée qui allaient perdurer dans un cadre très particulier.

Aujourd’hui, en 2019 et dans le schéma général du plan "Ma santé 2022", ce gros dossier semble enfin prêt à se concrétiser. Et il est aisé – comme il l’était déjà au début des années 2000 (voir encadré) – de trouver dans la presse scientifique médicale internationale des arguments probants en faveur de cette évolution des métiers, au bénéfice des patients et des professionnels eux-mêmes.

Des résultats équivalents

Dans le dernier numéro de l’année 2018, les Annals of Internal Medicine publient une étude exploitant les données recueillies dans les dossiers de plus de 350 000  diabétiques âgés de plus de 18 ans. Ces patients étaient régulièrement suivis dans près de 600 centres de soins primaires de la Veterans Administration (VA)(1), principalement par des médecins (3 487 patients, soit 74,9 %), des nurse practitioners, l’équivalent de nos infirmiers en pratique avancée (1 445 patients, soit 18,2 %) et des physician assistants, métier encore sans équivalent réel chez nous (443 patients, soit 6,9 %).

Les résultats cliniques ont été appréciés selon trois paramètres (valeur moyenne sur une année de suivi) : HbA1c, pression artérielle systolique et LDL-cholestérol. Et aucune différence cliniquement significative n’a été révélée selon que les patients étaient suivis par un médecin, un nurse practitioner ou un physician assistant. Les auteurs en concluent que des résultats cliniques équivalents chez des patients diabétiques peuvent ainsi être obtenus… Conclusion en réalité amendée dans la discussion de l’article, où ils précisent que l’organisation de l’exercice à la VA privilégie les échanges permanents, informels ou davantage formalisés, et que cela tend vraisemblablement à harmoniser les pratiques des uns et des autres. Qui s’en plaindrait ?

1. Organisation de soins "emblématique" et hospitalo-centrée aux États-Unis qui, après avoir frôlé le dépôt de bilan, il y une douzaine d’années, a réussi son virage ambulatoire.

Déjà en 1979 et en 2000

En janvier 2000, le Jama publiait un travail – un peu militant – montrant l’équivalence des soins apportés par des nurse practitioners ou des physicians assistants à des patients diabétiques, asthmatiques ou hypertendus. Dès 1979, dans les Annals of Internal Medicine, Harold Sox publiait une revue(2) de 21 études dont il concluait que, pour des malades stables vus en centre de soins où sont présents d’autres professionnels, rien ne permettait de différencier des soins donnés par un nurse practitioner ou un physician.

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