"La proposition de loi portant amélioration de l’accès aux soins par la confiance aux professionnels de santé de Stéphanie Rist et Aurore Berger a été adoptée le 19 janvier à l'Assemblée nationale. Son principal objectif : améliorer l’accès de la population aux soins de certaines professions paramédicales, notamment aux masseurs-kinésithérapeutes.

Depuis, les syndicats et l'Ordre des masseurs-kinésithérapeutes se sont félicités de ce résultat, qu’ils considèrent comme une avancée pour la profession et pour les patients. À l'opposé, les syndicats médicaux et l'Ordre des médecins ont décidé de poursuivre leur mobilisation contre les mesures envisagées par cette proposition.

Plusieurs points de vigilance doivent être questionnés au regard des arguments avancés par les corporations médicales et celles des masseurs-kinésithérapeutes pour défendre leurs positions toujours opposées.

Démarche prolongée des protocoles de coopération

D’une part, les représentants des masseurs-kinésithérapeutes se disent "favorables aux transferts de compétences" dans le cadre de l’accès direct à leurs soins. Et de l’autre, les médecins restent opposés à tout transfert du diagnostic médical. Or, cette réorganisation de l'accès aux soins n’implique ni transfert de compétences, ni délégation de tâches du médecin généraliste vers le masseur-kinésithérapeute. Comme l’indique l’Inspection générale des affaires sociales (Igas), la volonté d’ouvrir l’accès direct aux soins à des professions paramédicales prolonge la démarche initiée par les protocoles de coopération. Toutefois, la différence de fond avec cette proposition de loi réside justement dans l'absence de délégation de tâches du généraliste vers le masseur-kinésithérapeute : la capacité de ce dernier à distinguer les patients devant bénéficier ou non de ses soins fait déjà partie de ses compétences à travers le bilan-diagnostic kinésithérapique. Le diagnostic médical, quant à lui, relève toujours et uniquement de la compétence du médecin.

Selon les représentants des médecins opposés à cette réforme, "la compétence médicale est seule à même de poser un diagnostic et d’établir un plan de soins". À leurs yeux, la réorganisation de l’accès aux soins constituerait une perte de chance pour les patients qui consulteraient en accès direct un masseur-kinésithérapeute. Or, les données scientifiques provenant de plusieurs pays ayant instauré de longue date cet accès direct mettent en évidence l’absence d’événements indésirables sur une très large population de patients évalués et traités en accès direct.

De plus, la sécurité de la prise en charge de ces physiothérapeutes [dénomination internationale utilisée correspondant au titre français de masseur-kinésithérapeute, NDLR] s’est révélée élevée avec une réorientation appropriée des patients devant bénéficier d’un avis médical et non de soins masso-kinésithérapiques.

Les professionnels de ces pays ont acquis, dès leur formation initiale, les compétences de dépistage des signes de gravité (drapeaux rouges), l’évaluation des facteurs psychosociaux, la réalisation d’un examen physique, le suivi des caractéristiques cliniques relatives au suivi du progrès du patient et la planification des soins masso-kinésithérapiques appropriés en l’absence de prescription médicale préalable. Ces compétences font d’ailleurs désormais pleinement partie du référentiel de formation du diplôme d’état français de masseur-kinésithérapeute suite à la réforme de 2015. Toutefois, bien que les représentants des masseurs-kinésithérapeutes estiment que "la profession [est] prête pour l’accès direct", il est certain qu’une mise à niveau des compétences des professionnels diplômés avant 2019 sera nécessaire. Au regard des expériences internationales, ce point est d’ailleurs crucial pour garantir une sécurité optimale de la prise en charge fournie aux patients.

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