L'annonce est tombée le 31 août dernier : les patients pourront obtenir des antibiotiques pour une cystite ou une angine, directement auprès de leur pharmacien, sans passer par le cabinet médical. À condition de confirmer l'origine bactérienne par un test rapide d'orientation diagnostique (Trod) et un entretien avec le patient. Cette prise en charge, jusque-là réservée aux pharmaciens intégrés aux maisons et centres de santé ainsi qu'aux CPTS est donc étendue aux pharmaciens hors exercice coordonné ; le cadre ayant été jugé trop contraignant par les syndicats des pharmaciens. "C’est une chose que nous appelions de nos vœux depuis très longtemps. Cela va dans le bon sens", lance Pierre-Olivier Variot, pharmacien et président de l’Union de syndicats de pharmaciens d'officine (Uspo), qui dénonce un "blocage de la part de certaines professions de santé, qui ne voulaient pas déléguer la prescription d’antibiotiques". À ses yeux, cette situation mettait le pharmacien dans une situation difficile vis-à-vis des patients souffrant d’angine ou de cystite et sans possibilité de consulter un médecin rapidement. "Nous ne rendions pas service. Nous étions obligés de réorienter les patients vers les urgences, sachant que le délai de prise en charge est de douze heures, car il n’y a plus de médecin disponible. Ou alors, nous leur demandions de souffrir jusqu’au lendemain ou jusqu’au lundi, si cela arrivait le week-end. Ce n’était pas entendable. Cela fait des mois que cela doit sortir de l’exercice coordonné. Nous appliquons un protocole clair, simple et défini, il n’y a donc pas besoin d’exercice coordonné..."
Un avis que ne partage pas Pascal Gendry, médecin généraliste et président d’AVECsanté. "Les protocoles garantissent la sécurité pour l’usager. Nous ne sommes plus du tout dans le cadre d’une équipe coordonnée et donc d’un protocole, confie-t-il. Nous avons travaillé des protocoles qui répondaient à un besoin, mais qui n’allaient pas nécessairement dans ce sens. Ce travail a été un peu dévoyé de sa production et de son objectif initial. Nous sommes dans un autre champ qui n’est pas forcément porté dans le cadre d’une équipe pluriprofessionnelle." Pour le médecin généraliste, l’élargissement de ces protocoles sans obligation de coopération comporte un "risque" : celui de savoir jusqu’où cela ira. "Nous commençons avec ces deux situations pathologiques et le problème est de savoir où nous nous arrêterons ensuite". Il redoute que "petit à petit, ce qui est fait pour que l’accès aux soins soit facilité mais aussi sécurisé, ne soit plus la priorité. Nous sommes au début d’une certaine désorganisation du système, et ce n’est ni ce que nous voulons, ni ce qui est nécessaire."