Article publié dans le numéro de mars du "Concours pluripro"

"Nous n’arrivons pas à recruter un nouveau médecin généraliste. Je veux bien répondre à votre interview si vous m’accordez une annonce gratuite." Frédéric Nadolny ne recule devant rien pour faire tourner au mieux son centre de santé, et c’est à ça qu’on le reconnaît ! Après cette semi-boutade, il accepte bien volontiers notre entretien, sans contrepartie.

Le centre municipal de santé (CMS) Colette-Coulon de Stains, en Seine-Saint-Denis (Île-de-France), est le dernier en date, et restera sans doute le dernier, où Frédéric Nadolny aura posé ses valises et son fauteuil de dentiste après bientôt quarante ans de carrière au service de la santé bucco-dentaire, et de la santé en général. "Avec un père médecin généraliste de quartier et une mère infirmière de bloc, j’ai toujours été intéressé par les questions de santé. J’aurais aimé être chirurgien... Il aurait fallu que je travaille plus en première année, mais je ne regrette pas. Chirurgien-dentiste, c’est aussi de la chirurgie. C’est très varié, entre la prévention, les soins conservateurs, les extractions, la réparation, les soins prothétiques... On ne s’ennuie jamais. On voit des patients de tous les âges. Et puis j’ai un côté manuel, alors je me sens un peu ajusteur-fraiseur !"

À la recherche d’une dimension sociale

L’homme à la silhouette longiligne cultive le goût pour l’exercice collectif. "J’ai rapidement trouvé que le travail en cabinet était enfermant. Chacun est face à son patient, coupé du reste de la communauté, peu sollicité à se former, à discuter…" Il aime aussi se mettre au service d’une patientèle qui "a une cohérence". Ce sera successivement les agents de
la RATP, le public des centres dentaires ou de santé de l’Assurance maladie, des enfants au sein de l’Institut de prophylaxie dentaire infantile (IPDI) ou encore des gaziers et électriciens… Et la recherche de rentabilité, qui a conduit à la fermeture ou à la refonte de plusieurs de ces établissements, le met en rogne : "C’est la Cnam qui fixe les tarifs et qui constate en même temps qu’ils ne sont pas suffisants pour rendre ses centres de santé rentables." À l’exemple de l’IPDI, qui se voit départi de son activité de soins, pour ne garder que le dépistage et l’orthodontie. Mais aussi au Centre national de santé de la Caisse centrale d’activités sociales (CCAS) des agents des Industries électriques et gazières de France, dont la gestion est confiée à un groupe mutualiste chargé de redresser les comptes. En parallèle des conditions de travail qui se dégradent, observe-t-il, on demande au dentaire de compenser le déficit d’autres pôles de la structure. "Ce n’était plus le projet de santé auquel j’avais adhéré." Pas question pour lui de "jouer" sur l’orthodontie et les prothèses pour faire entrer l’argent.

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