Rafael Precioso nourrit le désir de devenir infirmier « avant même d’entrer au lycée. J’avais vu comment une infirmière s’occupait de ma grand-mère », se souvient-il. En Espagne, c’est un métier bien plus valorisé qu’en France, mieux rémunéré, moins féminisé, même s’il reste majoritairement féminin. Mais il regrette qu’en France, l’infirmier soit mal considéré, presque comme un homme (ou une femme) à tout faire : « Chez mes patients, parfois, on me demande de récupérer des médicaments à la pharmacie ou même d’aller acheter des cigarettes !, se désole-t-il. Autour de moi, quand je dis que je suis infirmier, beaucoup me répondent “C’est bien, moi, je ne pourrais pas”. En Espagne, c’est un métier qui suscite plus d’admiration. »
En 1999, son diplôme d’infirmier en poche, il se lance dans une tournée internationale, en remerciant l’espace Schengen qui lui ouvre les portes de toute l’Europe. Un an en Angleterre, six mois en Italie, puis la France, où il rencontre sa femme, et qu’il ne quittera donc plus, même si, « en soins de ville, je préférerais exercer en Espagne ». Son expérience européenne lui permet d’apprécier les différences entre les systèmes de santé : « En France, le système curatif, et en particulier le système hospitalier, est excellent. Il y a des services de pointe. » En revanche, le système de soins primaires n’est, selon lui, pas à la hauteur car « on fait très peu pour la prévention et la promotion de la santé ».
« En Espagne et en Angleterre, il n’y a pas un système libéral, en ville, et un système hospitalier à part, mais c’est un système national et universel dans lequel les gens ont beaucoup plus confiance. Ils accèdent plus facilement aux centres de soins primaires, qui peuvent les orienter vers des centres de spécialités et, en dernier recours, à l’hôpital. Jamais on ne va directement aux urgences, sauf pour un problème vital », décrit-il. Dans l’Hexagone, il travaille d’abord dans un hôpital parisien, en réanimation pédiatrique, avant de s’installer en libéral, « pour gagner plus », mais n’apprécie pas cette transition : « J’ai eu l’impression de devoir me marchander, d’aller démarcher les médecins pour qu’ils veuillent bien m’adresser des patients. » Quand il a l’opportunité de rejoindre la MSP Paris-Porte de Vanves (XIVe), sur le point d’ouvrir, il n’hésite donc pas une seconde.
Il commence à développer des actions de promotion de la santé, en accord avec la place que mérite, pour lui, la prévention, et avec sa définition du soin qui est d’« aider quelqu’un en difficulté, parce que cette personne ne veut pas, ne peut pas ou ne sait pas comment se soigner ». Il fait donc de l’éducation thérapeutique, mène des entretiens motivationnels, dans le domaine de la tabacologie ou de l’alimentation par exemple, « pour que la personne découvre par elle-même ce qu’elle veut pour sa santé » et « même si la rémunération n’est pas à la hauteur du temps passé ».