Article publié dans Concours pluripro, février 2025
 

"La qualité est une notion particulièrement complexe dont les contours dépendent généralement de qui la regarde, à savoir le professionnel, le patient, l'accompagnant ou le régulateur", lance Amélie Lansiaux, directrice de l'amélioration de la qualité et de la sécurité des soins à la Haute Autorité de santé (HAS). À ce jour, il s'agit d'un sujet d'attention des politiques publiques, qui affichent de vives attentes dans ce domaine. Et cette année, dans le cadre des négociations de l'accord conventionnel interprofessionnel (ACI) avec les maisons de santé et les CPTS, et de l'accord national avec les centres de santé, l'Assurance maladie entend remettre le sujet sur la table.

Mais bien que la réforme "Ma santé 2022" en faisait une priorité, il n'existe aucune définition de la qualité du système de santé qui soit universelle. Multidimensionnelle dans ses composantes (pertinence, efficacité, sécurité, accessibilité), elle peut se résumer par la volonté de garantir au patient qu'il recevra le bon soin, par le bon professionnel, au bon moment. "Le problème, c'est que dans le secteur de la santé, il y a nécessairement une asymétrie, un traitement efficace pour un patient qui ne l'est pas pour un autre, rappelle Zeynep Or, directrice de recherche à l'Institut de recherche et documentation en économie de la santé (Irdes), spécialisée dans les questions liées à la performance du système de santé. Les variations de pratiques médicales existent partout dans le monde." Celles-ci s'expliquent par les différences de culture, de connaissances et de croyances des professionnels de santé ainsi que des patients, par la clarté des recommandations cliniques ou encore par les financements.

Face à ces variations systémiques, tendre vers une qualité des soins implique d'activer de nombreux leviers et de mobiliser l'ensemble des acteurs.

 

Manque d'indicateurs de qualité

S'assurer de la pertinence et de la qualité des soins dispensés implique de disposer d'indicateurs pour les mesurer puis les évaluer afin d'identifier les points pour lesquels des améliorations sont envisageables. Des améliorations qui peuvent être de plusieurs ordres : organisationnelles, cliniques, qualitatives, de résultat ou de process... L'idéal étant de tendre vers leur conjugaison, tout en laissant une flexibilité aux acteurs pour une appropriation locale. Pour Zeynep Or, les indicateurs de qualité font aujourd'hui défaut. "L'expérience patient est, certes, importante, mais elle ne suffit pas à définir la pertinence et la qualité des soins, tout comme la nomination de référents qualité ou le nombre de réunions dédiées à ce sujet, estime-t-elle. Les indicateurs sur la prescription, la vaccination ou d'autres pratiques cliniques sont nécessaires."

La HAS a un rôle fondamental à jouer pour élaborer des recommandations claires et lisibles dans ce domaine. Et si jusqu'à présent, le développement d'indicateurs s'est principalement concentré sur le secteur hospitalier, les soins primaires sont de plus en plus concernés. "Nous avons développé des indicateurs sur quelques pans de la qualité, mais cette démarche reste difficile à mettre en oeuvre en soins primaires", fait savoir Laetitia May-Michelangeli, cheffe du service évaluation et outils pour la qualité et la sécurité des soins à la HAS, précisant que les équipes sont confrontées à plusieurs points de blocage. À commencer par le manque d'informatisation des médecins, "un préalable pour mettre en place des indicateurs de résultats, car ce ne sont pas eux qui vont gérer la collecte et l'analyse des résultats", pointe Dominique Le Guludec, médecin et professeure, ancienne présidente de la HAS.

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