Après des semaines de débats, la mesure-phare de la proposition de loi transpartisane portée par le député Guillaume Garot et plus de 250 députés, d'abord rejetée en commission le 26 mars dernier, vient de passer un cap à l'Assemblée nationale. En effet, les députés ont voté hier soir en faveur d’une régulation de l’installation des médecins. "Six millions de Français sont sans médecin traitant, huit millions de Français vivent dans un désert médical", a martelé Guillaume Garot. Une inégalité qui crée un "sentiment délétère pour notre République qui a failli dans sa promesse d'égalité de tous devant la santé", a-t-il soutenu.  

Rétabli avec une confortable majorité dans l'hémicycle (155 voix contre 85), malgré l'opposition du gouvernement, l'article adopté régulerait donc l'installation des médecins libéraux ou salariés, conditionnée à un aval de l'agence régionale de santé. Il serait octroyé de droit dans les zones sous denses mais soumis à un départ préalable dans les territoires mieux pourvus. Ainsi, le médecin ne pourrait s'installer que lorsqu'un autre s'en va.  

 

"Une fausse bonne idée"

"Une pénurie de médecins, même potentiellement régulée, reste une pénurie", a argué le ministre de la Santé, Yannick Neuder, évoquant un risque de déconventionnements, de départs de médecins à l'étranger, et une "perte d'attractivité de l'exercice médical". C'est une "fausse bonne idée" qui "ne ferait qu'aggraver le cœur même de la pénurie : le manque d'attractivité de la profession", a abondé la députée Joëlle Mélin (Rassemblement National), dont le groupe est le seul à avoir voté unanimement contre. Et Jérôme Nury (Les Républicains) de rétorquer que "la régulation doit être essayée car elle porte en elle la justice et l'égalité aux soins de nos concitoyens"

 

Dans un communiqué la semaine dernière, une quinzaine d'organisations des principaux représentants des médecins libéraux s'était opposées à la mesure, affirmant qu'une régulation "coercitive" aurait des "effets contre-productifs" sur l'accès aux soins. Des arguments rejetés par les défenseurs de la régulation estimant que "les médecins [auraient] la liberté d'installation sur 87% du territoire", a insisté Philippe Vigier (MoDem). 

Mardi, le Premier ministre François Bayrou s'est dit mardi favorable à une forme de "régulation", mais a appelé à bâtir un plan solution incluant l'ensemble des acteurs, d'ici fin avril. Les débats se sont ponctuellement tendus hier soir quand Yannick Neuder a fait planer la menace de "coupe(r) les discussions" en cas d'adoption de l'article sur la régulation…  

Thibault Bazin (Les Républicains), a, lui, remis en question la méthodologie pour flécher l'installation car "les ARS ne fournissent un zonage que tous les deux ans" et "pas pour les médecins spécialistes".  En réponse, le groupe transpartisan a fait adopter le principe d'un "indicateur territorial de l'offre de soins", actualisé chaque année, fondé sur le "temps médical disponible par patient" et les spécificités de chaque territoire. 

Les débats sur le reste du texte, qui prévoit une suppression de la majoration des tarifs pour les patients sans médecin traitant, ou encore le rétablissement d'une obligation de participer à la permanence des soins, doivent reprendre les 6 et 7 mai prochains. 

 

[Avec l'AFP] 

 

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