"Il a consacré sa vie aux valeurs de la médecine libérale. Et il travaillait dans un quartier qui n’est pas le plus favorisé du Mans", indique Bernard Richard, médecin et ancien président de l’association Adops72, chargée d’organiser la permanence des soins, dans les colonnes de Ouest-France. Installé depuis près de 30 ans dans le département de la Sarthe, Sami Khedira incarnait la "figure du médecin de famille hyper disponible". Son décès au beau milieu d’une consultation la semaine dernière, a suscité un véritable émoi au sein du département et de la profession, et a ravivé un problème majeur de la médecine libérale : le vieillissement et l’usure des médecins.

Considéré comme un professionnel extrêmement impliqué, il assurait de nombreuses gardes dans la maison médicale du Pôle santé sud. "Il travaillait beaucoup les dimanches et jours fériés. Quand il y avait une carence, il se proposait pour dépanner. C’était quelqu’un de discret, mais très droit, loyal et respectueux. Sa disparition nous plonge dans une grande tristesse », rapporte Bernard Richard, qui souligne son dévouement qui "restera un exemple", tout en estimant que son collègue est "mort au combat". Il était considéré comme un "homme d’honneur, toujours actif et accueillant", comme le confirme Onur Yilmaz, président du conseil des quartiers sud de la ville et ancien patient du médecin. "Il ne comptait jamais ses heures, c’était un acharné du travail. Sa disparition touche les gens du quartier. Il y a des fleurs posées sur la fenêtre de son cabinet." Selon Franck-Dominique Bruel, président du Conseil de l’ordre des médecins de la Sarthe, "beaucoup de gens lui disaient de lever le pied, mais c’était un gros bosseur. On est aujourd’hui confronté à cette problématique des médecins qui tournent énormément et qu’on pense corvéable jusqu’à plus soif."

Dans ce département de l’ouest de l’Hexagone, presque 35% des médecins généraliste actifs ont plus de 60 ans, selon l’atlas de la démographie médicale en France de 2023 et 20% ont plus de 65 ans. Beaucoup continuent d’exercer faute de successeur et par crainte de laisser leurs patients sans accès aux soins. Rien que dans l’agglomération du Mans, 25.000 habitants seraient sans médecin traitant et ce chiffre grimpe à presque 74.000 sur l’ensemble de la Sarthe (13% de la population contre une moyenne nationale de 8%).


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2000 patients sans médecin

Le décès de Sami Khedira, qui a suscité une vive émotion, a également engendré un autre problème : ses anciens patients, soit presque 2000 personnes, se retrouvent désormais sans médecin. "Un nombre considérable de ses patients appellent le 116-117 et le 15 dans une profonde détresse", précise Bernard Richard. Pour éviter une situation d’engorgement des urgences, l’Adops a adressé un courrier aux médecins de la Sarthe, afin de proposer des créneaux de consultation pour le Samu.

 

[Avec Ouest-France]

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