"Un protocole de coopération, c’est comme un chemin de fer. Pour que ça fonctionne il ne faut pas sortir des rails !", assure Mehdi Djilani. Et si le pharmacien, installé sur l'île d'Oléron est si catégorique, c’est parce depuis 2023 il a mis en place, avec la maison de santé, un protocole qui fonctionne. Un nom, "douleurs et abcès dentaires" et de nombreux objectifs : désengorger les urgences, soulager les patients et trouver une solution rapide pour les patients souffrant de douleurs dentaires. D'autant qu'en été, l’île d’Oléron voit sa population passer de 22.000 à 250.000 habitants, mettant sous forte pression les structures de santé locales. "Les douleurs dentaires, telles que les abcès, nécessitent souvent une prise en charge rapide, mais les délais s’allongent faute de ressources suffisantes", poursuit le pharmacien.

Et l’île d'Oléron, bien que dotée d’un hôpital, ne dispose pas de service d’urgence. Une situation qui pousse souvent les patients à contacter le 15. Pour limiter les appels et "soulager les patients", la MSP d’Oléron, qui réunit plus de 40 professionnels de santé – dont 8 médecins généralistes, 6 pharmaciens et 12 infirmières –, a adopté le protocole "Douleurs et abcès dentaires" en juin 2023. Un an plus tard, le bilan est sans équivoque. "119 patients pris en charge, 0 complication et un pic de demande de prise en charge entre juin et août", raconte Laurent Beaubras, coordinateur de la maison de santé, en charge du bilan chiffré de ce protocole. 

 

Une responsabilité partagée

Inspiré d’un dispositif développé par l’URPS Corse, ce protocole local repose sur la collaboration entre pharmaciens, infirmières et dentistes.  "Il permet aux professionnels formés de délivrer des antalgiques de palier 1 ou 2 – selon la douleur - afin de soulager les douleurs des patients rapidement et efficacement ", reprend le coordinateur. Pour cela, 14 pharmaciens et 2 infirmières ont suivi une formation de deux heures sur la physiopathologie dentaire dispensée par un médecin généraliste et le dentiste référent du protocole. 

En pratique, seul un pharmacien formé peut appliquer le protocole au sein de sa pharmacie.  "La procédure inclut des critères stricts d’inclusion et d’exclusion pour garantir la sécurité des patients, reprend Mehdi Djilani. La responsabilité, en cas de problème, est partagée entre tous les membres impliqués, y compris la MSP." Financé par un Fonds d’Intervention Régional (FIR), la rémunération des professionnels mobilisés est fixée à 25 euros par acte : 9 euros pour le dentiste référent et 16 euros pour le pharmacien ou l’infirmière concernée. 

Le succès de l'initiative repose sur la qualité de la coordination entre les différents professionnels de santé et la clarté des procédures administratives.  "D’ailleurs, ce modèle intéresse d’autres MSP et CPTS et des discussions sont en cours pour le déployer dans d’autres régions", se réjouit le pharmacien. Et la décision d’une possible généralisation appartient aux autorités de santé, "qui doivent encore lever certaines réticences". Mais en soulageant les patients rapidement et efficacement, la MSP d’Oléron espère montrer la voie d’une santé de proximité adaptée aux besoins de son territoire. 

 

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