Une unité dans la diversité de l’offre. Soit le leitmotiv du Premier ministre derrière l’annonce d’un réseau France santé censé rassembler, sous trois lettres et un label, les soins de proximité, leur donner de la visibilité et apporter du financement pour consolider ou créer cette offre de soins. Maisons de santé, centres de santé, hôpitaux de proximité, CPTS... Cette pluralité de solutions aux difficultés d’accès aux soins – qui témoigne de la souplesse et de l’agilité des acteurs de terrain à proposer une réponse différenciée en fonction des contraintes territoriales – sera donc uniformisée, si le PLFSS 2026 est adopté, en obéissant à un cahier des charges.
Dès lors, les futures maisons France santé, centres France santé et communautés France santé (attention aux deux acronymes CFS, qui pourraient prêter à confusion) auront à charge de proposer "une solution de santé en moins de trente minutes et (…) un rendez-vous médical sous quarante-huit heures". Des communautés dépossédées dans cette logique gouvernementale – du moins, pour l’heure – de leurs attaches "professionnelle" et "territoriale". "Le T de CPTS ne se négocie pas", lance sur LinkedIn le président d’une CPTS aquitaine : "C’est lui qui garantit la pertinence de nos actions, l’adaptation à nos populations, la coordination entre les acteurs de santé, sociaux, associatifs et élus locaux. C’est ce lien concret, humain, vivant, qui donne sens à notre travail collectif. L’abandonner serait une ligne rouge que personne ne peut franchir."
Une ligne, et pas n’importe laquelle, dans le prochain projet de loi de financement de la Sécurité sociale, qui est largement décriée. D’abord, cette ligne budgétaire de 130 millions d’euros – rien qu’en 2026 – qui passe mal vu les économies demandées de toutes parts. Ensuite, cette ligne de régulation par les ARS et les CPAM, chargées de coordonner le déploiement au niveau territorial. "Veut-on remplacer la confiance par le contrôle, la réalité par la statistique, le terrain par les tableaux Excel ?", s’indigne un autre médecin engagé dans une CPTS parisienne. Enfin, cette ligne – d’évolution pour certains, de contrôle pour d’autres – qui, dans l’objectif de rendre l’offre de soins plus visible aux yeux du patient, opère un changement d’appellation, déjoue l’ancrage territorial, supprime la notion d’engagement des acteurs de terrain... mais qui ne permettra pas d’améliorer, en soi, l’accès aux soins. Oui, l’offre de soins dans les territoires doit évoluer pour être plus lisible, tant pour les professionnels que pour les patients. Mais cette évolution n’aura de sens que si elle est envisagée discutée, réfléchie avec les acteurs de terrain. C’est dans cette confrontation d’idées et cette recherche commune de solutions que se construit le collectif. Et non dans un label privé de diversité.