Décrire et comprendre les processus d’émergence des CPTS ainsi que les transformations des pratiques coopératives du point de vue des acteurs et des territoires. C’est l’objectif du projet de recherche CaPiTaLeS, porté par les universités Paris-Est Créteil et Saint-Quentin-en-Yvelines, et le laboratoire de géographie de la santé Lab’Urba. Cette recherche s’appuie sur les retours d’expérience de "12 CPTS" des départements 77, 78, 91, 93 et 94, explique Laura Moscova, présidente de la CPTS Coulommiers La Ferté-Gaucher. Financée dans le cadre du programme de recherche sur la performance du système des soins (Preps), elle vise également à décrire une typologie des CPTS, à comprendre les motivations et les freins des professionnels à y adhérer, observer comment ils articulent leurs actions avec les problématiques du territoire, et identifier des critères d’évaluation pertinents et mesurables des actions mises en place. "La volonté était aussi de sortir d’une recherche médicocentrée pour s’ouvrir à la recherche en soins primaires, qui associe d’autres professionnels et d’autres disciplines, comme les sciences sociales", explique la médecin généraliste, l’une des dix membres de l’équipe de recherche.

Si la loi de modernisation de 2016 introduit les CPTS afin de développer une médecine de proximité plus structurée et d’encourager la coordination interprofessionnelle, ces organisations sont présentées comme une des solutions pour améliorer l’accès aux soins. "L’un des objectifs est d’accompagner les professionnels de santé à changer leur façon d’exercer en suscitant leur mobilisation autour d’un projet de santé commun", rappelle Laura Moscova. Les professionnels de santé étant donc les acteurs de la mise en oeuvre des CPTS, il était pertinent de questionner leur point de vue quant à l’émergence de ces organisations ainsi que leurs motivations et freins à y participer.

"On travaillait déjà sur le champ de l’organisation des soins primaires, et avec notre triple casquette de professionnel de santé, enseignant et chercheur, on voit cette réflexivité qu’apporte la recherche dans la manière dont on exerce le soin et comment elle peut nous accompagner à modifier nos pratiques." En 2020, l’équipe dépose une lettre d’intention au Preps – projet décalé à 2021 en raison de la crise sanitaire – puis rédige le protocole du projet. La réponse, positive, arrive à l’été 2021.

 

 

La force "collective"

Quels enjeux motivent les professionnels à participer et s’impliquer dans une CPTS ? Quelles sont leurs attentes ? Quelles expériences tirent-ils des CPTS en fonctionnement ? Huit focus group sont mis en place : 3 groupes d’infirmières (16 libérales, 5 membres d’une CPTS, 3 porteuses de CPTS et 3 qui découvraient le dispositif) et 5 de médecins (59 participants, majoritairement des hommes en MSP, MSU principalement, 22 porteurs de CPTS, 7 participants, 5 adhérents, 25 découvrant les CPTS). Chez les premières, il en ressort un "espoir" dans les CPTS et une prise de conscience "de l’importance de la force collective". Elles "sont motivées pour ne plus être seules, mais également fatalistes car “il n’y a rien à perdre” , note Laura Moscova, tout en décrivant leur crainte de devoir "faire plus" et de "disparaître dans la masse". Chez les médecins, on note un "enthousiasme de travailler à plusieurs et de pouvoir créer, d’envie de démocratiser la médecine, [de] participer aux transformations pour ne pas les subir". En revanche, ils craignent la complexité de mise en place et de fonctionnement, et redoutent le "risque de contrôle financier déguisé des institutions".

Ainsi, les premiers résultats sur les freins et les leviers à l’adhésion à une CPTS démontre que celle-ci est perçue comme "une organisation encourageante mais incertaine, assez mobilisante". Mais aussi que l’engagement est assez "inégal" car les acteurs semblent partagés entre optimisme et scepticisme. Le rapport doit être finalisé d’ici l’été prochain. Avec un objectif ultime de construire "un observatoire pluridisciplinaire des CPTS pour observer, produire de la donnée d’impact", assure Laura Moscova.

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