"Si nous considérons aujourd'hui que nous sommes en crise, nous risquons de commettre des erreurs d'appréciation et de ne pas adresser les bonnes solutions à un problème que nous aurions mal identifié." Car derrière le mot "crise" se cache une "notion de temporalité". Or Séverine Salgado est "persuadée" que la situation actuelle est une "manifestation de conséquences de tendances très lourdes, très structurelles et très structurantes qui ne peuvent plus être ignorées". À ses yeux, il faudrait donc plutôt parler de "transformations et de transitions" avec, à l'arrivée, un "potentiel point critique" sur de nombreux sujets. Dont la transition démographique et le vieillissement de la population, un fait connu depuis "des décennies" mais sur lequel "nous avons laissé s'accumuler les conséquences" alors que des "impacts pouvaient être anticipés". Mais aussi le numérique, sujet "fondamental", notamment pour le "financement de la protection sociale", ou la transition environnementale : "Nous sommes en train de franchir le septième seuil planétaire (sur un total de 9)", tout en rappelant que les scientifiques du Giec estiment qu'"un enfant qui naît aujourd'hui aura une espérance de vie plus faible que celle de ses parents…".
Toutes ces tendances transforment notre "vie politique et démocratique" et il n'y a pas, en la matière, "d'exception française", souligne Séverine Salgado, qui s'interroge sur les réponses apportées par les pouvoirs publics. "En général, il s'agit de réponses réglementaires", avec un aveuglement pour la "logique court-termiste", sans "réponse globale et systémique", regrette-t-elle. La proposition de loi Garot, qui "aurait pu être une bonne idée il y a quinze ans", est, à ses yeux, le parfait exemple de ces "mesures ponctuelles prises trop tard". Pour elle, pas de doute, "les pouvoirs publics ont organisé leur propre impuissance".