Le dernier Atlas de l’Ordre des médecins révèle que la part des médecins salariés est croissante : 48,7% des médecins en activité régulière en 2024 contre 41,9% en 2010. Une activité qui a augmenté de 15,7% entre 2010 et 2024 alors que l'exercice libéral exclusif et mixte ont tous deux diminué (12,2% et 23%). Comment interprétez-vous ces chiffres ?  

C'est ce que nous observons depuis au moins les dix dernières années, à travers les nombreuses enquêtes réalisées auprès des médecins : il y a une meilleure visibilité des centres de santé et un réel attrait pour le salariat. L'exercice salarié est de plus en plus attractif, mais ce n'est pas le cas dans tous les territoires. 

Cette croissance assez exceptionnelle, notamment du nombre du médecins en centre de santé comme à l'hôpital par exemple, témoigne peut-être aussi d'une relative perte d'attractivité de l'exercice libéral aujourd'hui…  


Une croissance qui pourrait vous donner une voix plus forte auprès des pouvoirs publics ?  

Oui, nous avons une plus forte reconnaissance des pouvoirs publics mais ce n'est pas autant que nous aurions pu l'espérer… Nous n'avons toujours pas voix au chapitre dans les négociations conventionnelles des centres de santé, l'accord national, par exemple. Il faut donc que nous arrivions à nous rendre plus visibles mais aussi représentatifs. Cela passera notamment par la transformation de l'USMCS [Union syndicale des médecins de centres de santé, NDLR] en un syndicat représentant tous les professionnels des centres de santé.  


L'an dernier, Agnès Firmin le Bodo avait promis un Plan centres de santé pour 2024. Les cartes ayant été rebattues au niveau gouvernemental, le plan n’a jamais vu le jour. Allez-vous pousser en ce sens ? Pourquoi ce plan est-il essentiel aujourd’hui ? 

L'annonce a été faite en octobre 2023 et on espérait qu'il y aurait un pendant au plan maison de santé… mais nous sommes déçus car il ne s'est rien passé. Il y a eu certes la dissolution du gouvernement mais aussi les changements répétés au ministère de la Santé, sans suivi des annonces de la ministre. Le Plan n'a d'ailleurs pas été repris par le ministre Valletoux alors qu'on aurait pu l'espérer.  
 

Lire aussi : Centre de santé : un lieu d'exercice attractif et une conviction assumée  
 

Pourtant nous avons besoin, plus que jamais, d’un plan de soutien aux centres de santé et nous espérons rencontrer rapidement à ce titre la ministre Darrieussecq. Ce plan devra comporter une vision globale, et traiter de la question des financements des centres, l’aide à l'investissement et le juste financement de leurs missions. Parce qu'aujourd'hui, il y de grandes disparités entre les subventions accordées par les ARS en fonction des régions. Beaucoup de centres de santé ont eu du mal, ou n'ont pas pu, mener à bien des actions pour cette raison.  

L’enjeu reste bien aujourd’hui de trouver un financement pérenne pour les centres de santé, ce qui passe par un accord national renouvelé pour lequel les professionnels de santé seront entendus et pourront apporter leur contribution. 


Le rapport Igas sur le financement des centres de santé devait être publié en janvier 2024. Savez-vous quand il sera publié ? 

Tout le monde en parle, tout le monde y fait référence mais nous, les premiers concernés, n'en avons pas eu connaissance. Il a bien été remis au ministère mais il n'a pas encore été rendu public. Nous nous interrogeons sur la raison. 


Lors de votre congrès national, un atelier abordera les difficultés de certains centres de santé à intégrer les CPTS.  Que proposez-vous pour remédier à la situation ? 

David Guillet, président de la fédération des CPTS, sera présent sur cet atelier donc nous espérons que la solution ou les solutions viendront de lui, d'autant qu'il semble favorable à ce que les centres de santé soient davantage plus impliqués. Une enquête a été réalisée en ce sens par la FNCS et les résultats seront dévoilés cet après-midi lors de l'atelier.  


L’accord national des centres de santé a bientôt cinq ans. Quels seraient les éléments à retravailler, à actualiser ou à rajouter selon vous dans le prochain avenant ? 

Ce n’est pas un simple avenant que nous attendons mais une renégociation complète de l’accord national. Ce qu'il doit contenir ? Tout d'abord, répondre à la question du financement global et de l’équilibre économique des centres de santé. Ce dernier reste aujourd’hui structurellement fragile pour toutes les structures, les financements étant aujourd'hui largement insuffisants en regard des missions des centres et des organisations qu’elles nécessitent. 
 

Lire aussi : Peps et Ipep : derrière la rémunération, de vrais projets de réorganisation  
 

Pour rappel, les centres de santé sont financés à 80 % par les actes, un financement inadapté à l’exercice pluriprofessionnel des centres, à leurs missions sociales, de prévention et de santé publique. La renégociation de l’accord national doit porter sur le juste financement de ces dernières, l’accès pour les centres à des financements forfaitaires comme c'est le cas pour les infirmières Asalée, et des financements alternatifs à l’acte, en y transposant les modèles Peps, Ipep et Secpa. De la même façon, il faudrait revaloriser certains métiers, comme celui de médiateurs en santé… Plusieurs dossiers sont en attente, et nous avec ! 

 

RETOUR HAUT DE PAGE