Article publié dans Concours pluripro, septembre 2024
 

Universités de la coordination en santé, épisode 5. Soit trois journées d'échanges, de retours d'expérience et de rencontres qui ont réuni, fin août, près de 400 participants dans les locaux de l'Institut national universitaire Champollion à Albi, une ville "moyenne" de quelque 50 000 habitants, a précisé Stéphanie Guiraud-Chaumeil, maire de la ville. Des Universités qui "résonnent totalement avec les missions d'une commune et des élus locaux", parce que les "parcours de santé, c'est l'une de nos responsabilités". En effet, la collectivité est "un ensemblier et un catalyseur quand il manque un maillon dans la chaîne" de coordination des parcours, a insisté Stéphanie Guiraud-Chaumeil, ajoutant que les villes "à taille humaine" – comme Albi – sont "des freins à la désertification de nos campagnes".

Ouverture, rencontre humaine et dynamisme. C'est ainsi que Théo Combes, médecin généraliste et président de la Facs Occitanie, résume ces 5es Universités de la coordination en santé, coorganisées avec la Facs nationale, et qui portaient, cette année, sur les "Coopérations plurielles et parcours de santé". "La coordination, c'est l'agencement logique des partis d'un tout en vue d'obtenir un résultat. Et bien que l'objectif soit le même – celui de l'intérêt du patient –, chacun parle de là où il est et a un point de vue partiel, et parfois partial, sur le parcours du patient. La coordination, elle est donc forcément plurielle, complexe, mais elle obéit aux mêmes principes : l'écoute, la reconnaissance de l'autre et le plaisir de la rencontre humaine", observe celui qui est également président de la CPTS du Grand Gaillacois et du DAC 81.

Universités de la coordination en santé
Universités de la coordination en santé
Universités de la coordination en santé
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Au-delà de la prescription

Pour "éviter les trous dans la raquette" – expression fil rouge de ces journées –, "l'interconnaissance est essentielle" et "chacun doit trouver sa place". Sur la communauté de communes Auray Quiberon Terre atlantique (Bretagne), le contrat local de santé (CLS), "l'un des plus anciens dispositifs de coordination", a été mis en place "beaucoup plus tard", notamment "après la création du DAC, des CPTS et des MSP. Il a donc fallu trouver notre place dans cet écosystème, qui comptait déjà plusieurs structures de coordination", précise Nolwenn Calvez, coordinatrice de l'unité de santé au CLS. L'axe santé mentale est retenu par les élus locaux, afin de mettre cette thématique au coeur des politiques publiques. Dès lors, "on a essayé de raccrocher un maximum de personnes avec des points de vue différents afin d'avoir la vision la plus globale possible" : la communauté de communes, les communes, et tous les acteurs du monde de la santé, soit les professionnels de santé et les établissements mais aussi le volet médicosocial, la prévention, l'environnement, les usagers..., détaille-t-elle.


Sachant qu'en France "autour de 15 millions de personnes" sont concernées par une maladie chronique, "comment peut-on les accompagner dès que le diagnostic est posé ?". La question a été évoquée lors d'une table ronde car "dans le paysage complexe des soins de santé, la coordination pour les patients atteints de maladies chroniques est devenue un enjeu majeur dans le parcours de santé dès la détection initiale de la maladie jusqu'à la prise en charge aiguë et chronique", ont rappelé les organisateurs. "Dans une maladie chronique, la prescription n'est que la prescription, assure Alain Devallez, médecin directeur du pôle prévention, promotion et parcours en santé Filieris Sud et président du DAC 30. Mais l'accompagnement, la relation d'aide, la médiation sont fondamentales. Car notre rôle, en accompagnant le malade chronique, c'est de faire en sorte qu'il puisse intégrer les modifications qu'entraîne la pathologie dans sa vie quotidienne."

Un enjeu "majeur" car il s'agit de "décomplexifier la complexité", d'intervenir en équipe – "et c'est important" – pour limiter l'incidence de la maladie chronique sur le quotidien. Un avis que partage Jacques Martini, médecin diabétologue et président de Diabète Occitanie. "Notre mission, c'est d'armer les patients et de les préparer pour affronter cette complexité. Et la force d'un dispositif régional, c'est d'être en mesure de lancer précocement la coordination et le travail autour du parcours."


crédit : Nicolas Caruso
 

Coordonner, et aller-vers

Communiquer, guérir et aider. À travers ses trois missions, l'association de patients AFM-Téléthon vise à accompagner les usagers dans leurs parcours de santé et de vie. Et pour Arnaud Caupenne, son directeur médical, l'enjeu pour les professionnels de santé, c'est de s'adapter aux nombreuses mutations que connaît le système de santé. Notamment ces dispositifs qui permettent de se coordonner en amont et en aval de l'hôpital autour des besoins du patient. "Mais aujourd'hui, personne ne forme les soignants à ces questions. Il y a une vraie responsabilité des doyens d'ouvrir les facultés aux professionnels de la coordination, aux usagers, aux aspects médico-sociaux, aux droits à la santé... Le coeur du métier de médecin, c'est de soigner, mais il ne faut pas oublier qu'il soigne dans un environnement et qu'il est important qu'il comprenne cet environnement." S'il concède que la coordination, "c'est le monde de l'acronyme", il est essentiel, à ses yeux, de rendre visibles tous ces outils qui y contribuent.
 


Et pour les rendre visibles, il faut décloisonner. "La coordination, c'est une façon d'aller-vers. Et on n'en fait pas en prescrivant et en restant dans son cabinet", insiste Sylvain Duriez, médecin coordinateur au DAC Appui Santé Lille Sud-Est Douaisis et président de la CPTS Pévèle du Douaisis. "La coordination, c'est un acte d'engagement. Apprendre à se connaître et comprendre ce qui se passe autour de nous, c'est un processus continu, récurrent. Et il faut activer tous les leviers possibles – notamment la formation – parce que cette coordination ouvre des perspectives de travail et des possibilités de collaboration." À l'exemple de la gouvernance en place au sein de sa CPTS, qui compte dans son bureau élargi en conseil d'administration des chargés de mission de l'hôpital mais aussi la coordonnatrice du DAC et des équipes des maisons et centres de santé membres...

"Pour le DAC, la coordination territoriale, c'est un impératif mais possiblement aussi un vrai casse-tête." Ainsi, pour "aller encore plus loin dans la maille collaborative", Loïc Massardier, directeur du DAC de l'Ain, estime qu'il faut miser sur l'échelle territoriale qui est "la maille la plus fine pour travailler la coordination". Cette coordination territoriale peut sembler "comme un perpétuel recommencement mais ça peut aussi être une perpétuelle opportunité d'améliorer brique par brique les choses". Une échelle malheureusement "sous-estimée, sous-évaluée, sous-financée", regrettent les acteurs de terrain.

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