Article publié dans Concours pluripro, mai 2023
 

En première analyse, la bibliographie internationale est plutôt pauvre pour ce qui concerne la "médiation en santé" ; on y reviendra. Et c'est plutôt du côté de Paris et de l'Île-de-France qu'il faut se tourner pour trouver les premiers faits marquants. Deux en particulier retiennent l'attention, qui se situent juste en amont et en aval du texte de loi par lequel la médiation en santé a été consacrée. On peut rappeler ce texte en date du 26 janvier 2016 qui installait une "médiation sanitaire" visant "à améliorer l'accès aux droits, à la prévention et aux soins des personnes éloignées des systèmes de prévention et de soins, en prenant en compte leurs spécificités" (article L1110-13 du code de la santé publique).

Quelques mois auparavant s'était tenu, dans le XVIIIe arrondissement de Paris, le premier fait marquant, un modeste colloque intitulé "Place de la médiation : vers une reconnaissance ?". L'initiative en revenait aux acteurs du secteur associatif au sein duquel convergeaient deux puissants mouvements promoteurs de médiation, le premier dédié aux migrants et le second aux patients atteints par le VIH. Le compte-rendu est aisément accessible.

Le second fait marquant est survenu en octobre 2017, quand la HAS a utilement publié un référentiel de compétences et de bonnes pratiques – largement inspiré par des professionnels du terrain – sur "la médiation en santé pour les personnes éloignées des systèmes de prévention et de soins". La biblio de ce document confirmait la paucité de la biblio internationale, avec une seule référence (belge, déjà ancienne).

Une explication vraisemblable à ce déficit apparent de biblio sur la médiation renvoie à l'utilisation générique dans les revues internationales des termes "social workers" ou "lay health workers", au sein lesquels la médiation et les médiateurs sont peu ou prou inclus parmi les tâches souvent essentielles assumées par les travailleurs sociaux et autres bénévoles ou aidants. Cela tient également au fait que, dans nombre de pays de culture anglo-saxonne, la fonction semble prendre le pas sur le statut et que l'individualisation d'une (nouvelle) profession se révèle accessoire et finalement secondaire.

 

Majorer l'efficacité des consultations

Justement, une publication dans le BMJ sous la signature du directeur d'un institute for healthcare innovation situé à Seattle, tout au nord de la côte ouest des États-Unis, souligne l'importance des social workers ou lay health workers au sein des équipes de soins primaires. Au passage, la publication rappelle sobrement les principaux avantages d'un exercice coordonné pluriprofessionnel incluant les possibilités d'intervenir à l'échelle d'une population sur un territoire défini, de protocoliser (et d'adapter) les prises en charge les plus fréquentes, d'accroître considérablement l'implication des malades et de leur entourage dans le suivi quotidien de leurs affections, de majorer l'efficacité des "consultations" auprès de différents professionnels aux compétences complémentaires mais bien coordonnés et, enfin, de se donner les meilleures chances de détecter précocement les éventuelles complications évolutives. Et, dans le cadre de ces avantages, les "médiations" réalisées par les travailleurs sociaux et bénévoles/associatifs sont souvent déterminantes, en particulier quand il s'agit d'identifier et de réintégrer dans le système de soins des patients qui y échappent et d'améliorer au quotidien le suivi de leur situation sanitaire et sociale.

Le seul souci est que cette publication date de février 2000 (!) et que les choses tardent à être mises en oeuvre à une plus large échelle (alors que des résultats positifs et probants étaient déjà observés et démontrés voilà plus de vingt années).

Mais le monde bouge. En témoigne cette récente étude publiée dans le BMC Family Practice et qui rapporte des résultats positifs sur le rôle de médiateurs en santé. Le travail a été mené entre 2013 et 2017 dans le cadre d'un accord intergouvernemental entre la Hongrie et la Suisse. Ainsi, des généralistes hongrois, bénéficiant du concours de médiateurs en santé au sein d'équipes pluripro, ont pu observer un surcroît d'adhésion à des programmes de dépistage ou de prévention, ainsi que des réductions sensibles des difficultés d'accès aux soins pour des populations défavorisées. Dont acte.

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