Article publié dans Concours pluripro, février 2024
 

Leadership en santé, la question est d’importance. Plus de 1 milliard d’occurrences en 0,29 seconde sur Google en interrogeant « leadership healthcare ». Il faut sans doute y voir un effet induit par le mouvement de fond qui, depuis une vingtaine d’années, à l’international et en milieu ambulatoire, conduit progressivement les professionnels de santé – et singulièrement les médecins – à privilégier les regroupements (pluri)professionnels à l’exercice traditionnel, autonome et individuel. En effet, ces regroupements suscitent toute une série d’adaptations qui, jusque-là, ne se posaient guère. Le leadership au sein d’un groupe est de celles-là. Certes, il y en a d’autres, diversement ressenties et exprimées, comme les notions de "territoire", de "responsabilité populationnelle" et d’"exercice coordonné" sinon en équipe, sans négliger les nouveaux modes de rémunération… Bref, toute une série de questionnements pratiques qui, pour la génération charnière actuelle, renvoient à des questions qui n’ont pas été abordées lors de leur formation initiale*, théorique ou pratique.

La chose est sensiblement différente pour les professionnels qui exercent en établissement. Voilà bien des années que les plus renommés et prestigieux de ces établissements, comme la Mayo Clinic aux États-Unis, ont développé divers programmes sur le leadership, pour lesquels les plus jeunes des collaborateurs (l’équivalent de nos chefs de clinique) sont "présélectionnés" puis invités à s’impliquer, afin d’améliorer leurs perspectives de carrière… Il se peut, cependant, que l’appétence d’aujourd’hui pour un sujet nouveau comme le leadership décline progressivement, dès lors que les regroupements pluriprofessionnels se seront banalisés et que l’utilité – si ce n’est la nécessité – d’un leader se sera estompée… Mais nous n’en sommes pas là. Si bien qu’il est utile d’approfondir ce que l’on doit comprendre par leadership, quels en sont les éléments constitutifs et comment on peut en faire l’usage le plus pertinent pour quelles finalités.

Attentif, à l'écoute, empathique

Pour cela, on peut se référer à une publication de janvier 2023 par une équipe de la Northeastern University, une université privée, bostonienne et pluridisciplinaire, fondée à la fin du XIXe siècle, et comportant trois écoles de santé (médecine, sciences infirmières et dentaires) parmi une dizaine d’autres facultés. Les principales caractéristiques qui font le leader y sont listées : attentif, à l’écoute, empathique, compétent et inspirant la confiance, prompt à montrer l’exemple ou innover, flexible selon les contextes ou les interlocuteurs et finalement capable de gérer les crises (comme l’a bien montré la récente pandémie Covid). L’impact potentiel de leaders au sein des personnels de santé est particulièrement souligné, alors que près de la moitié de ces professionnels sont exposés au burn out et/ou pensent à abandonner leur poste et se reconvertir…

Au-delà, les qualités qui rendent un leader particulièrement efficace sont individualisées. Avant tout, l’absence de complaisance et de contentement de soi pour lui-même, associée à ce que les Anglophones désignent par mentorship : le leader aspire à susciter le leadership chez les autres. Ensuite, l’insatisfaction (quasi) systématique du statu quo, l’humilité (traduite notamment par la reconnaissance de ses erreurs ou insuffisances) complétées par un tropisme constant pour encourager les autres à s’améliorer, évoluer, jusqu’à mieux réussir en dehors de la sphère d’influence du leader ou même à le supplanter… Tout un programme ! Pour finir, on retiendra que la référence la plus citée sur internet, qui renvoie à une publication londonienne selon laquelle la théorie de l’homme providentiel – venu au monde avec un charisme formidable –, n’est guère applicable au monde de la santé et que les qualités qui font le leader peuvent parfaitement se travailler et s’acquérir… Ainsi soit-il !

NOTE
On peut cependant s’inquiéter que ces divers sujets restent encore insuffisamment abordés, en particulier lors du troisième cycle de formation initiale (maquettes d’internat)
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