« Évaluation de l’impact d’une formation pluriprofessionnelle, en Meuse, au repérage et à l’accompagnement en soins primaires des femmes victimes de violences conjugales. » Le point de départ de cette intervention du Dr Audrey Ronchi au 13e Congrès de médecine générale France est la rencontre, pendant ses stages d’internat et son remplacement, avec Olivier Bouchy, médecin généraliste à la MSP du pays de Revigny (Meuse). « J’ai évoqué avec lui, en 2016-2017, l’idée de travailler, pour ma thèse, sur la question des violences physiques et du harcèlement », explique-t-elle, d’autant qu’il avait déjà encadré une autre thèse portant sur les freins au dépistage par les médecins. « Le Dr Manon Dautrevaux, qui avait  réalisé cette thèse, proposait une riche étude de la littérature et des solutions. Notamment une fiche réflexe en trois volets (j’identifie, j’agis et j’oriente), ainsi que les coordonnées de correspondants locaux. » L’autre axe proposé : former les médecins.

Une étude qui fait mouche car en lien avec l’agence régionale de santé de la Meuse, le centre d’information sur le droit des femmes et des familles (Cidff) Meuse, le conseil départemental de l’Ordre des médecins, la déléguée départementale aux droits des femmes et à l’égalité, l’unité médico-judiciaire du CHRU de Nancy, le Dr Maria Riff (médecin généraliste) et le Dr Raphaël Demettre (chef des urgences de Bar-le-Duc), les Drs Bouchy et Dautrevaux lancent une formation à destination des professionnels de santé. Audrey Ronchi fait partie de ce groupe de travail : « Chacun y a contribué : aide financière, compétences organisationnelle, pédagogique ou logistique, aspect juridique et administratif… Et on a très vite étendu et adapté la fiche réflexe aux autres départements de la région Grand-Est. » 

Un enjeu de santé publique

Les violences conjugales concernent 9 à 10 % des femmes âgées de 20 à 59 ans, et ont des répercussions tant sur la santé mentale que physique. En 2017, dans la lignée d’un DPC pluriprofessionnel à Commercy, Barle-Duc et Verdun, une formation a été organisée en deux sessions. La première, comptant 32 participants, a fait l’objet de cette évaluation. L’objectif étant d’interroger les participants – 14 médecins généralistes, 7 infirmières, 4 pharmaciens, 2  masseurs-kinésithérapeutes, 2 orthophonistes, 2 sages-femmes et 1 dentiste – tant sur l’amélioration de leurs connaissances que sur la hausse du taux du dépistage des violences et la modification de leurs pratiques professionnelles.

Une évaluation réalisée en trois temps : un questionnaire avant la formation, à trois mois, et à neuf mois. Ainsi, si les professionnels notent, avant la formation, leurs connaissances à 8,3 sur 19 (score de novo), une nette amélioration est visible à trois mois (14,3) et neuf mois (14,9). Mais aussi un meilleur dépistage – de 28 % à 57 %, puis 84 % –, une hausse du nombre de victimes prises en charge, une plus grande collaboration avec les structures ressources, une plus forte utilisation de la fiche réflexe…

Si la mise en place de cette formation a parfois été complexe (« certaines URPS étaient plus aidantes que d’autres »), l’équipe mise « sur une formation en soirée pour réunir le maximum de libéraux. Le département meusien étant assez étalé, nous avons préféré nous déplacer pour offrir la même formation à tous et éviter qu’ils aient à faire de la route, explique Audrey Ronchi. La partie pédagogique a été importante car les professionnels sont tous concernés par la question des violences conjugales. Pour ma part, j’ai appris à créer un lien de confiance avec la patiente, ne pas avoir peur de poser des questions sur ce qu’il se passe à la maison, et qu’elle accepte que je l’examine, que je la déshabille. J’ai aussi pu rencontrer d’autres professionnels de santé et des acteurs locaux qui peuvent m’aider et aider ma patiente. Pour, finalement, ne pas me sentir isolée face à cette problématique des violences conjugales ». 

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