"C’est très important de travailler avec le territoire. Le territoire, ce ne sont pas seulement les professionnels de santé, ce sont aussi les élus et les communes ainsi que les centres hospitaliers." Lors de la 2e édition de la Journée des CPTS Yvelinoises, le 6 décembre dernier, Sophie Carré Crétois, médecin généraliste et présidente de la CPTS Sud Yvelines, a rappelé l’importance de cette échelle d'organisation.

"Dans le sud des Yvelines, les projets de santé reposent sur ce trépied professionnels, élus/communes et centres hospitaliers. Nous avons besoin de nous coordonner entre tous ces acteurs afin d’améliorer la prise en charge", a-t-elle assuré lors de cette journée qui a réuni plus de 300 participants réunis au château du Bois du Rocher à Jouy-en-Josas (Ile-de-France). Dont Gérard Larcher, sénateur des Yvelines et président du Sénat, ou encore Albert Lautman, directeur général de la CPAM de l’Essonne qui s’était vu confié la mission "Tour de France des CPTS" en 2023. L'occasion pour la médecin généraliste "faire passer des messages sur l’importance de développer ces projets".

Initiatives mises en place, retours d’expérience, freins et difficultés notamment en ce qui concerne le déploiement des CPTS et l’adhésion des professionnels... "Les CPTS commencent à prendre place dans l’organisation territoriale. Je pense que nous ne pourrons pas revenir en arrière", a lancé Lorenzo Macieira, président de la CPTS Grand Versailles. "L’accès aux soins est notre mission principale, notre mission socle. Notre CPTS fédère 1.800 professionnels de santé et couvre 18 communes pour un total de 270.000 habitants.... Et nous voyons que la population sait qu’elle doit passer par la CPTS pour trouver un médecin traitant", a ajouté le médecin généraliste.

La CPTS Grand Versailles a d’ailleurs répondu à "800 demandes d’accès à un médecin traitant de patients en ALD" sur un total de 1.500 sur le territoire qu’elle couvre. "Cela fonctionne très bien", se félicite-t-il. D’ailleurs, le territoire des Yvelines compte 13 CPTS (11 en activité et 2 en construction) et est couvert à 84% par ces organisations territoriales. Plus de 1.250 professionnels de santé sont engagés au sein d’une CPTS Yvelinoise (chiffres de la DGOS et de la CPAM 78).  

 

Plus de souplesse pour plus d’adhésion

"Pour permettre le développement des CPTS et améliorer le recrutement et l’adhésion des professionnels de santé sur le territoire, il faut donner un peu plus de liberté dans les projets, que cela soit dans les missions socles et les missions facultatives, précise Sophie Carré Crétois. Les professionnels doivent pouvoir développer leurs propres projets, afin de les inciter à rentrer dans un plus grand projet, celui du territoire..." Mais se pose un problème d’ampleur, confie la médecin : Les CPTS sont un 'pool' de professionnels de santé très investis dès le départ et qui, par manque de bras et de temps, peuvent être amenés à s’épuiser et à s’essouffler sur la durée. Nous avons besoin de pouvoir protéger ces professionnels, c’est là l’objectif du projet des CPTS : améliorer l’accès aux soins dans l’intérêt des patients, mais aussi dans celui des professionnels."

C’est un sujet qu’ils ont "entendu partout" lors du Tour de France des CPTS, assure Albert Lautman : "Nous nous devons d’attirer les professionnels et cela n’arrivera pas avec un cadre trop rigide et trop contraignant et qui donnerait le sentiment d’être un opérateur de la puissance publique ou de travailler pour le compte des institutions. Une CPTS est un collectif de professionnels, qui, sur un territoire, en lien avec ce dernier, porte un projet qui correspond à un besoin d’accès aux soins mais aussi, de qualité de vie des professionnels."

Pour le directeur général de la CPAM de l’Essonne, il faut néanmoins "un cadre négocié et discuté" afin de pouvoir "appréhender ce qu’est une CPTS" : "Si nous nous sommes trompés, discutons et ajustons-nous. Si un indicateur ne semble pas adapté, changeons-le... le tout dans un esprit de dialogue". Pour autant, selon le directeur général de la CPAM de l’Essonne, il faudra "rendre des comptes" sur les projets mis en place : "Certains parlementaires nous disent que nous mettons beaucoup d’argent [dans les CPTS] et demandent donc la possibilité d’avoir un suivi car il s’agit d’argent public, une denrée rare en ce moment. Ce n’est pas pour être tatillon, nous devons être fiers et rendre compte de ce que cela produit. Je pense que nous n’avons rien à cacher."

 

 

À ses yeux, les CPTS pourraient jouer le rôle de "corps intermédiaires" en santé, des groupes interlocuteurs entre la population et l’État. "Nous devons repenser nos organisations en y mettant de l’efficience collective. Et l’organisation pluripro territoriale, qui part du territoire, est une chose nécessaire pour pouvoir transformer le système de santé."

 

Le maillon au cœur du partenariat

"Il n’y a pas si longtemps, j’ai vu que certains remettaient en cause les CPTS, dans une étude qui méritait un peu plus d’exigences scientifiques, mathématiques et financières, a déclaré Gérard Larcher. J’ai bien noté ce qui a été dit sur la nécessaire souplesse et l’autonomie qui doivent être laissées aux CPTS. L’accord professionnel interprofessionnel doit rester un cadre souple, sans tomber dans le travers bien conçu de la norme et du corset réglementaire qui empêcherait les initiatives et les expérimentations territoriales."

Vieillissement de la population, autonomie, prise en charge des troubles de la santé mentale… "Le sujet de la santé et la présence médicale est la première préoccupation" lors des nombreux entretiens avec les maires, assure le sénateur des Yvelines et président du Sénat. Citant le rapport du Tour de France des CPTS  qui préconise de "reconnaitre progressivement les CPTS comme un authentique partenaire, un interlocuteur représentant le secteur ambulatoire auprès des tous les acteurs", il estime qu’il faut "repenser [les] modalités d’actions, mais aussi faire tomber quelques bastides. Les CPTS sont le moyen privilégié pour garantir la meilleure organisation territoriale possible des soins, notamment ceux de premiers recours. Vous êtes le maillon qui permet une organisation territoriale de proximité du secteur ambulatoire, tourné vers l’usager", a-t-il poursuivi.

Des organisations "fondamentales" donc pour assurer cette "nécessaire cohérence des soins primaires" tout en faisant sorte qu’un "partenariat entre les professionnels de santé libéraux, les ARS et l’Assurance maladie, répondent aux impératifs de santé publique". Pour le président du Sénat, les CPTS sont "un choix" fait au niveau local de "travailler ensemble", de "développer des projets autour d’une communauté".
 

 

Mesurant "l’usure des professionnels de santé", il estime cependant qu’aucune leçon n’a été tirée de la crise Covid. "Durant cette période, nous avons cassé tous les codes. Nous n’avons pas tiré les leçons pour rebâtir nos codes à partir de l’expérience que nous avons vécu durant cette crise sanitaire. Je pense que nous devons réinventer cette relation, et donc nous avons besoin d’un État fort mais aussi de confiance entre les différents acteurs. La réponse n’est pas que dans l’argent, elle l’est aussi dans nos modes d’organisation."

 

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