Sur la plateforme d'orientation post-bac Parcoursup, le nombre record de candidatures aux instituts de formation en soins infirmiers (Ifsi) atteste de l’attractivité de la formation : en 2021, 689 000 dossiers ont été déposés auprès des 365 Ifsi, estime le ministère de l'Enseignement supérieur… quand en 2017, ces derniers dénombraient 180 000 candidatures. Une augmentation qui s’explique, en partie, par la réforme de 2019 car si jusqu’alors les candidats devaient passer un concours pour chaque école à laquelle ils postulaient, avec frais d'inscription et déplacements, depuis 2019, ils candidatent sur dossier auprès de dix Ifsi maximum, à travers Parcoursup, sans frais ni concours.

"Le métier est très valorisé et respecté dans l'opinion publique", explique à l'AFP Mathilde Padilla, présidente de la Fédération des étudiants infirmiers (Fnesi), mais il existe un gouffre entre la formation et la réalité du terrain." Résultat : les défections sont nombreuses au cours du cursus de formation : selon les chiffres de 165 Ifsi transmis au Comité des instituts de formation du paramédical (Cefiec), près de 13% des étudiantes ont abandonné leur formation deux mois après la rentrée 2021. Soit autant de futures infirmières perdues pour un secteur "aux besoins de recrutement très importants", rappelle Amélie Roux, responsable des ressources humaines pour la Fédération hospitalière de France (FHF). Car ces abandons se traduisent ensuite en difficultés de recrutement par les hôpitaux, selon une commission d'enquête du Sénat publiée en mars.

 

Raisons personnelles et difficultés financières

Récemment, le gouvernement a annoncé une série de mesures pour varier les profils des étudiants dans le paramédical – campagne de pubs, annonce d'ouverture de 10 000 contrats d'apprentissage à la rentrée prochaine, etc. – , espérant ainsi attirer un nouveau public et limiter le nombre d'abandons dus à des raisons financières, dans un secteur où écoles et établissements de santé ont peu recours aux contrats d'apprentissage. Pour les représentants d'étudiants et formateurs infirmiers, l'apprentissage est "un moyen, mais pas la solution à tout". "Entre les stages et les apprentissages théoriques", la formation dans le paramédical s'appuie déjà sur le travail de terrain, souligne Amélie Roux, de la FHF.

C'est la confrontation avec la réalité de l'hôpital ou tout autre établissement de soins, que l’étudiante infirmière découvre pendant ses stages, qui est la première cause des abandons, pointe Mathilde Padilla. L'enquête du Cefiec évoque, quant à elle, les "erreurs d'orientation" et des "motifs personnels" que soulignent les étudiants sur le départ. "Le concours donnait au moins aux étudiants le temps de maturer un projet et de réfléchir au métier", avance Michèle Appelshaeuser, sa présidente.

Le rapport du Sénat tacle la "moindre pertinence" de l'accès via Parcoursup. "La sélection, où il n'y a plus d'entretien, n'est pas adaptée", a jugé Rémi Salomon, président de la commission médicale des Hôpitaux de Paris, lors de son audition au Sénat. La "demande surabondante" de lycéens souhaitant embrasser ce métier "dirige vers les Ifsi trop de profils paraissant insuffisamment motivés ou préparés à la réalité de la formation", estime le rapport du Sénat.

Se disant "complètement contre" un retour du concours d'entrée, Mathilde Padilla en appelle plutôt à une homogénéisation des critères de recrutement entre les différents Ifsi, et à un "travail sur l'orientation", dès le lycée, pour éviter les désillusions une fois en formation.

[Avec AFP]
 

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