Un demi-siècle après le développement à l’hôpital de l’homéopathie et l’acupuncture, les pratiques de soins dites non conventionnelles, alternatives ou complémentaires continuent de se banaliser et gagnent du terrain dans les établissements publics de santé, dans des maisons de retraite et des maisons de santé pluriprofessionnelles. Lesquelles de ces pratiques et dans combien de MSP ? AVECsanté, la fédération nationale des maisons de santé, n’a pas de statistique précise. Faute de cadre strict, justement, pour les recenser précisément 

La presse régionale se fait de temps en temps l’écho de l’arrivée de tel ou tel praticien "alternatif", réflexologue plantaire par exemple, dans une MSP. En 2022, la Répression des fraudes (DGCCRF) avait documenté l’installation de telles disciplines – sans préciser lesquelles parmi une cinquantaine qu’elle avait contrôlée (naturopathie, réflexologie, reiki, biorésonance, magnétisme…)  "à proximité ou au sein même de lieux de santé (maison de santé, cabinet médical pluridisciplinaire…)". Au printemps 2025, dans son dernier rapport d’activité, la Mission de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes) a aussi recensé l’installation de "non-professionnels de santé" (citant réflexologues, énergéticiens, psychopraticiens…) "dans les salles vacantes de maisons médicales situées dans des zones rurales", ou de "pseudothérapeutes" "dans des maisons de santé en recherche de professionnels" 

Risque sectaire et perte de chances

Est-ce grave, docteur ? "Si le recours aux pratiques non conventionnelles n’est pas toujours dangereux, en particulier lorsqu’il s’associe à un suivi médical traditionnel, il peut ouvrir une porte aux dérives sectaires", indique la Miviludes. Autre menace majeure : une atteinte à la qualité et à la sécurité des soins. Car "une grande majorité" de ces pratiques non conventionnelles "n’a pas été approuvée scientifiquement", rappelle la Miviludes. Pas plus qu’elles ne donnent lieu (hormis l’acupuncture) à des diplômes nationaux. Or des patients qui y recourent finissent par s’écarter des soins conventionnels, s’exposant à une perte de chance. Les plus exposés sont souvent les plus vulnérables en raison de leur maladie ou de leur situation. 

Un dernier danger porte sur l’information éclairée et le libre choix du patient. La coexistence en un même lieu de professionnels de santé conventionnels ou non, et le voisinage de leurs plaques, parfois similaires (arborant un caducée, par exemple), peuvent prêter à confusion. La DGCCRF a aussi déploré, comme facteurs d’embrouillamini, l’exposition d’ouvrages médicaux dans les salles d’attente de ces professionnels et leur référencement dans des annuaires dédiés aux professions de santé reconnues, tandis que la Miviludes a noté la création d’associations "regroupant plusieurs spécialités et recourant à des termes volontairement ambigus". "On a vu apparaître des 'pôles bien-être'", témoigne Pierre de Bremond d’Ars, médecin généraliste et président du collectif No FakeMed. Qui plus généralement dépeint un système d’enchaînement d’ailleurs plutôt lucratif : tel médecin conseille au patient d’aller voir un naturopathe, renvoyant lui-même vers un "maître reiki", conseillant à son tour tel autre praticien non conventionnel.  

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