Si la régulation de l’installation en ville des médecins est "une des réponses pour réduire les inégalités territoriales d'accès aux soins", elle "ne peut suffire", lance la Fédération nationale des centres de santé (FNCS). Dans une tribune publiée dans Mediapart le 25 avril dernier, jour de la présentation du "Pacte de lutte contre les déserts médicaux" de François Bayrou, celle-ci assure qu'"une autre réponse existe, éprouvée mais encore trop peu soutenue : les centres de santé". Des structures "non lucratives" qui "assurent une prise en soins inconditionnelle des patients, en secteur 1, sans avance de frais et sans dépassements d’honoraires, par des équipes de professionnels de santé salariés" et dont le modèle a été choisi par "de nombreuses collectivités territoriales pour répondre aux besoins de santé de leur population : municipalités, EPCI, départements et régions mais aussi associations, hôpitaux, universités". 

Alors que 6 Français sur 10 ont déjà renoncé à des soins ces cinq dernières années, que "dans de nombreux territoires, obtenir un rendez-vous médical relève du parcours du combattant", que la pénurie de soignants s'accompagne d'une "pression financière croissante sur les patients à laquelle participe l’augmentation du nombre de professionnels de santé exerçant en ville en secteur 2 et parfois, en secteur libre", que le reste à charge a augmenté de 50 % par rapport à 2019, la FNCS assure que "les centres de santé sont une des réponses les plus efficaces à la désertification médicale" 
 


Car ces structures "portent un modèle innovant d’exercice : salarié, coordonné, intégrant soin et prévention, territorialisé et de service public", qu'elles "peuvent adapter leur offre de santé en fonction des besoins des territoires", organisent "des coopérations et des parcours de soins cohérents avec les hôpitaux, les Ehpad et les autres établissements médico-sociaux, et les services publics de prévention"… Sans compter, précise la tribune, que "c'est un mode d’exercice attractif pour les jeunes professionnels de santé qui, pour beaucoup, plébiscitent le travail en équipe pluriprofessionnelle et sont sensibilisés aux enjeux de santé publique". 

"À la croisée des chemins"

Détaillant la dynamique des centres de santé ces dernières années (+169 % de CDS médicaux et polyvalents entre 2016 et 2024, soit +829 centres selon l'Observatoire des centres de santé), qui permet "l’installation de professionnels dans de nombreux déserts médicaux", la FNCS déplore que les centres de santé à vocation de service public, gérés par des collectivités, des associations non lucratives, des hôpitaux ou des mutuelles, "[fassent] état de graves difficultés financières", dont plusieurs menacés de fermeture, "faute d’un financement adapté à leurs missions  de soin, de prévention, d’accompagnement social, ou encore à la vulnérabilité de leurs patients et au travail en équipe". Le modèle de financement des centres de santé doit donc être "profondément repensé", assure la tribune de soutien aux CDS qui compte déjà près d'une cinquantaine de signataires. 

Fin mars dernier, la FNCS a dénoncé l'accord national des centres de santé, "plus adapté à l’évolution des pratiques des centres, en équipe pluriprofessionnelle coordonnée, aux besoins de santé des patients qu’ils prennent en soins et à leur engagement dans la prévention". L'ouverture de nouvelles négociations conventionnelles doit permettre notamment "à chaque centre de mobiliser au mieux les sources de financement à sa disposition", de "promouvoir" le modèle salarié "comme un modèle alternatif et complémentaire à l'installation libérale", de reconnaître et valoriser "de la manière la plus juste possible" l'engagement des centres de santé, majoritairement installés en zones sous-denses et en quartiers prioritaires de la politique de la ville, ou encore de "renforcer la lutte contre la fraude et notamment les pratiques déviantes de facturation" 
 


Pour la FNCS, "les centres de santé sont à la croisée des chemins. Les pouvoirs publics aussi". Le ministère de la Santé et la Cnam "vont devoir faire des choix décisifs: soutenir les centres de santé en consolidant leur modèle médico-économique par des financements de leurs missions pérennes et à leur juste coût, et ainsi pouvoir apporter une réponse efficace aux besoins des territoires et des populations ; à défaut, laisser de nombreux centres de santé fermer et voir s’aggraver un peu plus les inégalités territoriales de santé et les déserts médicaux".  

C'est donc "l’avenir des centres de santé" qui est en jeu à travers ces négociations conventionnelles. Mais au-delà, également et plus largement "celui de l’accès aux soins et à la prévention de la population dans tous les territoires pour que reculent enfin les déserts médicaux". 

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